Jean Dufaux continue d’explorer la lutte sans fin du Bien contre le Mal dans cette saga d’heroïc fantasy composée de quatre cycles, pour l’instant. Commencé en janvier 1993 avec Sioban, cette héroïne qui fait le lien entre les récits, le scénariste poursuit la construction de cet univers sombre, fait de fureur et de magie, où les appétits de pouvoir se déchaînent.
Aylissa, titre du tome 2 du cycle des Sudenne, entre dans le clan mené par Sioban. Cette dernière se trouve confrontée aux ambitions de sa cousine, la fille du frère de son père. Celle-ci semble prête à toutes les vilénies pour régner, disposant pour cela d’une capacité de nuisance peu commune et d’une beauté dont elle se sert, son corps étant un puissant outil de séduction dont elle use sans restriction.
Le scénariste jongle avec maestria avec des intrigues de pouvoir, l’émergence de créatures fabuleuses, mettant en scène des combats entre humains, contre des maléfices. Il revient, au moins à deux reprises, sur la phallocratie de ces clans dont les membres ne supportent pas qu’une femme puisse combattre, diriger.
À peine marié à Aylissa du clan des Sudenne, Sobold, le chef du clan des Greenwald, décède dans les bras de son épouse. Celle-ci s’empresse de mettre en œuvre la cérémonie des adieux pour faire brûler le corps. Lors de cette cérémonie, Lord Heron, son père, recommande à Aylissa de se montrer affligée.
Sioban et Seamus, bien que désireux de quitter les lieux pour échapper aux dangers qui les guettent, ne peuvent partir. Le clan des Greenwald vient demander des comptes et affirmer ne pas vouloir d’une femme à leur tête. Sioban s’interpose et réussit par la diplomatie à ramener le calme, forte de sa possession du Harfingg, ce symbole de pouvoir. Par contre, les Sacrifiés, ceux qui étaient les gardiens du Niddhog, le rejeton monstrueux d’une Morigane, veulent reprendre le Harfingg, arguant qu’il ne peut être détenu par quelqu’un d’étranger à leur clan. Et ils sont prêts à toutes les extrémités pour le reprendre.
Sioban est contrainte de se confronter physiquement au Mal, ce qui n’est pas sans conséquences pour elle, alors que Seamus se retrouve dans une situation très critique…
Paul Teng assure le dessin de ce cycle. Avec ses traits réalistes, ses vignettes fourmillantes de détails, il donne une dimension supplémentaire au récit déjà dense de Jean Dufaux. Il fait transparaître l’atmosphère délétère, l’aura maléfique de créatures, la sauvagerie des clans, la fourberie et la belle plastique de l’héroïne de l’album, Aylissa.
Les couleurs de Bérangère Marquebreucq complètent heureusement le dessin par un choix judicieux, en accord total avec les péripéties.
Cette nouvelle pierre d’un édifice particulièrement dépaysant et attractif donne à attendre une suite que l’on souhaite disponible très vite tant la tension du dénouement est forte.
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serge perraud
Jean Dufaux (scénario), Paul Teng (dessin) & Bérengère Marquebreucq (couleurs), Complainte des Landes Perdues — Cycle 4 : t.02 – Aylissa, Dargaud, octobre 2022, 56 p. — 15,00 €.