Sous un pseudonyme emprunté à une ville de Madagascar, Elena Biibolotti avec Mature et ses récits propose des aveux presque impossibles mais où la littérature érotique caresse lecteurs et lectrices avec grâce, humour et habileté.
Il y a là des surprises et de belles fractures non sans un rappel de Bataille dans des “histoires de l’oeil” qui n’oublient jamais le corps quelles que soient les héroïnes (et les héros aussi).
L’autrice parle le sexe avec décontraction et ironie pour le démystifier “comme s’il était le bruit de fond d’une tragi-comédie contemporaine, le bord glissant d’un obscène auquel personne n’échappe” écrit-elle.
Mais ce que beaucoup cachent (ou veulent fuir), l’artiste le montre.
Et ce, pour une raison majeure : le sexe “lubrifie” les conventions sociales en les défaisant et les perturbant voire les poussant dans leurs retranchements. Entre raison et désir, le sexe s’immisce, libère mais pas forcément.
Il reste néanmoins le point d’achoppement de l’humain très humain.
Elena Bibolotti s’en amuse. Elle nous délecte, poussant les sexualités qui glissent vers l’extrême, le point de rupture qui submerge. Elles sont dans ce livre bien plus que des commodités de la conversation.
C’est l’émulsion vitale — même pour celles et ceux qui voudraient lui dire “Non” — là où même ce qui est genré “dégénère”. Et qu’importe les moyens ou les âges.
Et les neuf histoires explorent la zone sombre sous la peau du stéréotype sous le regard féminin ou masculin auquel la créatrice donne voix. Chaque fois, le roi et la reine sont très vite nus. Dans sa prétention, le premier reste dominé par celle que depuis des siècles il croit dominer.
Elena Biboloti sait de quoi il retourne… Reste à espérer que ce livre sera vite publié en français.
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jean-paul gavard-perret
SadAbe, Mature, Kindle Edizioni, 2022, 160 p. — 16,00 €.