Véronique Bergen & Nausicaa Dewez, Mylène Farmer — Ailleurs et ecchymoses

Grand-Place des Orphiques

“Au début, Mylène m’apparut comme ma moi­tié, mon double retrouvé, frag­ment de moi dont on m’avait ampu­tée seize années durant. Un grain de sable ne tarda pas à grip­per cette fusion alchi­mique. Si je me retrou­vais en Mylène, se retrouvait-elle en moi ?” avouait il y a déjà long­temps Véro­nique Ber­gen.
Après avoir écrit un livre sur elle il y a une dizaine d’années, elle réci­dive avec une uni­ver­si­taire belge. Il s’agit d’une bio­gra­phie de la chan­teuse et sur­tout une intro­duc­tion à son uni­vers où se mêlent mythes, contes revi­si­tés, motifs récur­rents et personnages-doubles inven­tées par l’artiste.

Véro­nique Ber­gen a pris une cer­taine dis­tance avec son égé­rie sans que se perde le charme (au sens pre­mier) d’un tel modèle. Existe là une fas­ci­na­tion pour une femme, per­sonne non seule­ment publique mais véri­table icône pour des pas­sion­nés sou­vent gay.
Son sta­tut de femme fatale et objet intou­chable du désir la rend inac­ces­sible mais débride tout un ima­gi­naire. Il crée de véri­tables trans­ports amou­reux — Véro­nique Ber­gen n’est d’ailleurs pas la seule phi­lo­sophe tou­chée par le virus far­mé­rien (cf. Michel Onfray). Les deux auteures le par­tagent par­tiel­le­ment mais explorent sur­tout les fan­tasmes et enchan­te­ments de l’égérie.

C’est donc bien plus que ce qui res­semble habi­tuel­le­ment à un repor­tage, un docu­ment sur une chan­teuse. La grâce de l’écriture rend ce livre pas­sion­nant. S’y retrouve la “patte” ber­ge­nienne, sa façon de trans­for­mer les per­sonnes réels en per­son­nages de fic­tion — ce qui ne peut que com­bler Mylène Far­mer séduite par une telle atten­tion.
Son vécu et son oeuvre se retrouvent en écho des deux auteures, fans assi­dues mais pas que. Et Véro­nique Ber­gen délivre ses obses­sions à tra­vers ces évo­ca­tions, d’abord parce qu’elle reste tou­jours poète. Et à côté d’aspects infor­ma­tifs, le texte est cha­toyant et brillant dans ses incan­des­cences. Elles répondent à celles de la star.

L’ensemble est par­fois grave et les auteures assument une part belle aux confi­dences intimes (émo­tions, sen­ti­ments, désirs, colère, etc..) dans des aller-retours d’évocations qui bercent une telle tra­ver­sée ailleurs et ici même, entre joies et douleurs.

jean-paul gavard-perret

Véro­nique Ber­gen & Nau­si­caa Dewez, Mylène Far­mer — Ailleurs et ecchy­moses, Le Mur­mure Edi­tions, 2022, 286 p. — 20,00 €.

Leave a Comment

Filed under Arts croisés / L'Oeil du litteraire.com, Essais / Documents / Biographies

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>