Tous des oiseaux (Wajdi Mouawad)

Faire s’envoler nos conflits endémiques

Une jeune femme est assise à une table ; on lui apporte un livre. La biblio­thèque se des­sine autour d’elle. L’ouvrage est le pré­texte, le motif, le vec­teur d’une ren­contre. Car un gar­çon vient lui expli­quer l’improbabilité mathé­ma­tique de la coïn­ci­dence qui l’amène à lui par­ler ; sa réflexion sur le hasard, l’ordre ou le désordre des choses la séduisent. Nous revi­vons une his­toire d’amour entre une Arabe et un Juif, à New-York, deux per­sonnes que tout oppose, qui sont empor­tées dans la magie des com­men­ce­ments.
Le pre­mier temps de la repré­sen­ta­tion joue sur le contraste d’ambiance entre avant/après l’attentat, la sidé­ra­tion sen­ti­men­tale pro­duite par la défla­gra­tion d’une explo­sion qui fauche l’un des deux membres du couple. Le refus des parents du jeune Juif d’accepter la rela­tion amou­reuse avec une Arabe est l’occasion de remon­ter le fil de la généa­lo­gie, pour retrou­ver les moments où l’histoire fami­liale ren­contre l’histoire des peuples.

Après l’entracte, on sait qu’on va assis­ter à la révé­la­tion : atten­due, annon­cée comme sans cesse dif­fé­rée par le roman fami­lial, elle est pré­sen­tée comme char­gée d’un sens trop lourd pour être sup­porté. Une longue enquête, tra­gique, intime, déci­sive, conduit à revi­si­ter les obses­sions de l’auteur : la magie et les limites de l’amour, les secrets de famille, les conflits inter­mi­nables entre les peuples, l’ignorance de sa propre iden­tité, les ata­vismes dont on ne peut (qu’)hériter, en nous pla­çant au cœur du conflit israélo-palestinien, en rap­pe­lant les mas­sacres de Sabra et Cha­tilla.
Le spec­tacle est incon­tes­ta­ble­ment cohé­rent, puis­sant, enflammé. Mais il semble affecté de cer­taines lon­gueurs, se com­plai­sant par­fois au res­sas­se­ment, affecté tan­tôt d’un lyrisme grandiloquent.

Pour le dire sim­ple­ment, la pièce est propre à enchan­ter ceux qui découvrent Wajdi Moua­wad ; mais ceux qui connaissent bien ses textes et sa dra­ma­tur­gie peuvent nour­rir un sen­ti­ment de redite ou de déjà-vu.

chris­tophe giolito

 

Tous des oiseaux

texte et mise en scène Wajdi Moua­wad

Photo © Simon Gosselin

avec Jalal Alta­wil, Jéré­mie Galiana, Vic­tor de Oli­veira et Joce­lyn Lagar­rigue (en alter­nance), Leora Riv­lin, Judith Ros­mair, Darya Shei­zaf, Rafael Tabor, Raphael Wein­stock, Sou­heila Yacoub.

Assis­ta­nat à la mise en scène à la créa­tion Valé­rie Nègre ; assis­ta­nat à la mise en scène Oriane Fischer ; dra­ma­tur­gie Char­lotte Far­cet ; conseil artis­tique Fran­çois Ismert ; conseil his­to­rique Nata­lie Zemon Davis ; musique ori­gi­nale Eleni Karain­drou ; scé­no­gra­phie Emma­nuel Clo­lus ; lumières Éric Cham­poux ; son Michel Mau­rer ; cos­tumes Emma­nuelle Tho­mas ; assis­tée de Isa­belle Flosi ; maquillage, coif­fure Cécile Kret­sch­mar ; tra­duc­tion hébreu Eli Bijaoui ; tra­duc­tion anglais Linda Gabo­riau ; tra­duc­tion alle­mand Uli Menke ; tra­duc­tion arabe Jalal Alta­wil ; régie sur­titres Katha­rina Bader et Uli Menke en alternance.

Au théâtre de la Col­line, 15 Rue Malte Brun, 75020 Paris Tel 01 44 62 52 52

https://www.colline.fr/spectacles/tous-des-oiseaux-1

du 17 novembre au 17 décembre 2017 au Grand Théâtre

repris du 31 mai au 25 juin 2022 au Grand Théâtre

du mardi au samedi à 19h30 et le dimanche à 15h30 • relâche le dimanche 5 juin

spec­tacle en alle­mand, anglais, arabe, hébreu sur­ti­tré en fran­çais • durée 4h entracte inclus.

Pro­duc­tion La col­line – théâtre national.

 

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