Mais que cache une offre d’emploi mirifique…
La romancière installe dès le départ des faits signifiants. Son héroïne est en prison, accusée d’être responsable de la mort d’une petite fille. Puis, elle fait raconter son histoire par cette jeune femme en créant, par petites touches, une atmosphère anxiogène.
Le début de l’intrigue est une jolie trouvaille. Après quelques ébauches, quelques brouillons, Rowan rédige une longue, très longue lettre pour convaincre cet avocat de son innocence. Mais, Ruth Ware a plus d’un tour dans son sac à malices et propose un récit à plusieurs niveaux. En effet, si l’héroïne semble être tombée dans un piège, elle-même n’est pas d’une franchise exemplaire. Et parmi la galerie des protagonistes, les individus troubles sont nombreux.
C’est par une suite de lettres ébauchées en septembre 2017, depuis la prison de Charnworth, que la nurse de l’affaire Elincourt supplie Wrexham, un avocat, de l’aider car elle n’a pas tué cette fillette.
Elle sollicite ses services bien qu’elle ait l’aide d’un conseiller juridique car elle a le sentiment qu’il ne l’écoute pas, qu’il ne la croit pas. Elle reconnaît toutefois qu’elle n’a pas été toujours très limpide dans ses explications. Aussi, elle décide de commencer par le début et d’exposer les faits clairement, posément.
Tout a commencé par une petite annonce. Un couple résidant en Écosse recherche une nurse expérimentée. Le salaire proposé et les avantages matériels sont très conséquents. Cette offre est inespérée pour quitter Londres, un emploi où elle en se plaît plus. Rowan Caine part en l’Écosse pour un entretien… et obtient le poste.
Mais cette euphorie ne dure guère. Elle est perturbée par des facteurs extérieurs comme l’animosité de l’aînée des quatre filles, des bruits étranges, des faits troublants. On lui dit que ce vieux manoir truffé de technologies est hanté. Et puis, pourquoi tant de baby-sitters se sont succédé, certaines ne restant que quelques jours ? Très vite, elle se retrouve dans un climat anxiogène jusqu’à cette mort dont elle se dit innocente, bien qu’elle-même…
L’auteure a l’art de concevoir des personnages féminins qui se retrouvent dans des situations compliquées dont elles ont un mal fou à se sortir. Et les événements se succèdent, générant une tension palpable avec un lot de retournements de situations, de rebondissements surprenants.
Avec La Clé du sang, Ruth Ware offre un roman porté par une héroïne magnifique avec une intrigue d’une grande finesse et un travail remarquable sur la narration.
serge perraud
Ruth Ware, La Clé du sang (The Turn of the Key), traduit de l’anglais (Royaume-Uni) par Héloïse Esquié, Fleuve noir, coll. “Thrillers”, mai 2022, 400 p. — 20,90 €.