Et quelques pas de danse avec la mort
L’intrigue se développe autour d’une belle série de meurtres qui semblent liés d’une étrange façon. Les enquêteurs ont du mal à trouver le fil rouge (sang) qui guide le tueur. Cependant, celui-ci agit selon une méthodologie cohérente pour un but qui lui est personnel.
Il faudra donc toute la perspicacité du groupe des policiers pour déchiffrer ces éléments. Mais le romancier, jouant avec les nerfs de ses personnages et avec ceux de ses lecteurs, multiplie les pistes et les possibilités.
À Aulnay-sous-Bois, deux policiers arrivent vers un squat pour appréhender un suspect. Près de l’entrée, un SDF vrille son regard sur celui du jeune agent, l’enjoignant à ne pas entrer. Son collègue passe la porte, la fusillade éclate. Il est blessé. Le SDF s’empare de l’arme du jeune agent et tue systématiquement les dix dealers qui occupaient les lieux. Parce qu’il faut sauver l’agent blessé, Seth Khol laisse découvrir son identité. Il est commandant aux Stups, surnommé le Zombie.
Son retour dans la police après sa longue disparition et une cure de désintoxication secoue la hiérarchie. Il est connu pour être borderline, sujet à des dérapages sauvages. Parce qu’il veut rester flic de terrain, on lui confie la direction d’un groupe à la Brigade criminelle du SRPJ de Versailles. Son arrivée suscite quelques inquiétudes, surtout pour la capitaine Céline Fauvel qui vivait une belle collaboration avec Paul Baptista qui prend la tête de la Brigade, remplacé par Kohl.
La disparition de Gabin, six ans, et la découverte de son corps exsangue mobilise très vite son équipe. Les rares témoignages et les indices laissent supposer un homme grand comme suspect.
Un agriculteur est retrouvé enterré vivant, l’index pointé sur le ciel. Des indices lient ces deux meurtres. Un antiquaire meurt écrasé par ses meubles. L’équipe a fort à faire car rien ne relie ces victimes entre elles. Et les morts s’accumulent…
Pour Seth, il faut aussi gérer son quotidien car il est une menace pour un groupe de policiers qui, dans une situation périlleuse, ont dû faire soumission à la pègre. Ils veulent empêcher le Zombie de parler pour garder leurs postes…
Pour ce roman, Ghislain Gilberti conçoit une galerie de protagonistes structurée autour de Seth Khol. Il retient ce héros singulier qui porte en lui une rage, une colère qui l’ont amené à se détruire tout en conservant son instinct de flic des Stups. Les causes sont dévoilées dans le livre. Il a un passé de soldat dans l’infanterie de combat, ayant combattu au Kosovo et en Afghanistan.
Il est entouré par Paul Baptista qui a pris la tête de la Brigade criminelle et secondé par Céline, une capitaine maîtrisant psychologie et victimologie. Une autre actrice importante de l’histoire est Asia Baptista, la sœur de Paul, coordonnatrice générale des différents groupes de Police Technique et Scientifique de Versailles, une femme de caractère qui joue un rôle essentiel pout le dénouement de l’intrigue et la fin de la traque.
Toutefois, en introduction, l’auteur précise qu’il ne souhaitait pas reprendre, pour ce roman, des personnages récurrents. Mais ceux-ci, ayant souvent une vie propre, peuvent s’imposer. C’est le cas d’une commissaire. Et sa situation ouvre sans doute vers un nouveau livre qui augure de bons moments de lecture.
Le récit s’appuie sur de nombreuses références tant littéraires, culturelles que musicales. Il cite ainsi Giger, le créateur d’Alien. Il met en scène les Simulacres de la Mort d’Holbein-le-Jeune et le fanatisme religieux.
Avec ce roman, Ghislain Gilberti propose une intrigue solide, retorse, d’une délicieuse complexité qui pousse à tourner quelques pages de plus encore et encore.
Un thriller addictif !
serge perraud
Ghislain Gilberti, L’Évangile de la colère, Hugo, coll. “Thriller”, avril 2022, 576 p. – 19,95 €.