Favre manifeste un goût immodéré et une intelligence au sujet de la poésie. Sa défense et illustration n’a rien de statique.
Autant par sa façon de le monter en exergue que par sa proposition de textes le plus souvent inédits — ce qui fait une des richesses du livre.
L’essayiste prouve que, pour pénétrer dans la maison de l’être et du monde, il faut entrer “dans une autre demeure”. Celle — parfois reléguée au second plan — que la poésie propose à travers des auteurs essentiels de la fin du siècle dernier et des deux décennies du nouveau.
Favre retient ceux qu’il a choisis pour leurs écritures particulières et leurs renouvellements de la langue.
Nul besoin de citer tous ceux qui apparaissent ici : les grands y sont. Tous ont donné un sens particulier à ce mot valise : poésie.
Le livre crée à la fois un espace d’interprétation, une expérimentation et un atelier disséminé venant secouer la force d’inertie du genre par son débordement.
Pour le lecteur, un espace de formation s’ouvre devant chaque tentative qui s’écarte d’une formule dictée par un programme répétitif.
Favre prouve ainsi que les questions de poétique sont lourdes, parce qu’elles engagent, plus que d’autres, la totalité du langage, la totalité du rapport de la langue à la tribu (Mallarmé), qui va l’entendre ou réentendre et parfois la découvrir.
jean-paul gavard-perret
Jean-Luc Favre, Dans une autre demeure, Editions 5 sens, Genève, 2022, 488 p. — 27 CHF / 23,00 €.