Lilja Sigurdardóttir, Froid comme l’enfer

Un magni­fique per­son­nage de femme

Le pro­logue ins­talle un cli­mat fort inquié­tant. Aurora et Ísa­fold, sa sœur aînée, sont de mère anglaise et de père islan­dais. Aurora vit en Angle­terre, Ísa­fold en Islande. Aurora est aux prises avec un ven­deur de voi­tures dont elle a retrouvé l’argent caché par son épouse en ins­tance de divorce. Il conteste le pour­cen­tage de com­mis­sion qu’il avait accepté. Elle pos­sède les armes pour rem­por­ter l’affaire.
Sa mère lui télé­phone, très inquiète, car Ísa­fold, a dis­paru. Voilà deux semaines qu’elle ne donne aucune nou­velle. Son com­pa­gnon, Björn, ne répond pas non plus. Sur l’insistance de sa mère elle part pour l’Islande. Elle peut être en dan­ger car Björn la frappe. Aurora est déjà venue la sous­traire aux vio­lences conjugales.

C’est au bar de l’hôtel où elle est des­cen­due qu’Aurora ren­contre Hákon, un homme qui lui paraît fort sédui­sant. Lorsqu’elle sonne chez sa sœur, Grí­mur, un homme dans l’appartement au-dessous, est aux aguets. Il pense qu’il fal­lait bien s’y attendre, que tôt ou tard…
Et Aurora visite les hôpi­taux, se rend sur le lieu de tra­vail de Björn qui lui révèle qu’ils sont sépa­rés, qu’elle doit être repar­tie en Angle­terre… Mais ce qu’elle découvre…

La roman­cière base une par­tie de son récit sur la dif­fé­rence de carac­tère que peuvent engen­drer des parents issus de socié­tés, de civi­li­sa­tions dif­fé­rentes. L’art et la manière de vivre sont-ils plus ou moins ins­crites dans les gènes et sus­cep­tibles d’être trans­mis­sibles ? Nées de mère anglaise et de père islan­dais les deux filles sont bien dis­sem­blables.
L’aînée ne conçoit la vie qu’en Islande et vit depuis trois ans avec un com­pa­gnon bru­tal. C’est l’opportunité de dénon­cer les vio­lences faites aux femmes, ces coups qui peuvent dégé­né­rer en assas­si­nat. Aurora n’apprécie pas l’Islande, ni les Islan­dais. Mais des ren­contres vont peut-être faire évo­luer son opinion.

Avec son héroïne qui est détec­tive pri­vée, spé­cia­li­sée dans le recou­vre­ment de fonds, l’auteure crée des intrigues secon­daires d’un bel inté­rêt. Elle fait une superbe com­pa­rai­son entre les tré­sors que les pirates cachaient dans des îles avec les riches voleurs qui, aujourd’hui, planquent leurs avoirs dans des lieux simi­laires.
Elle décrit avec humour les prin­ci­pales com­po­santes de la vie en Islande, les carac­té­ris­tiques des popu­la­tions, cli­ma­tiques, le jour per­pé­tuel en été, la glace le reste du temps. Elle brosse un por­trait peu flat­teur des hommes de l’île : “Aurora trou­vait que les hommes islan­dais étaient lour­dauds et gros­siers…

Lilja Sigur­dardót­tir inté­resse ses lec­teurs avec de nom­breux sus­pects. Ils ne manquent pas entre son com­pa­gnon, ce voi­sin aux atti­tudes étranges, ce couple hété­ro­clite d’une vieille femme et d’un réfu­gié en situa­tion irré­gu­lière. Et puis, ces deux hommes qui séduisent l’héroïne, entre cet intri­gant Hákon et ce Daniel vers qui sa mère l’a envoyé.
Froid comme l’enfer se révèle un roman enthou­sias­mant pour son intrigue riche en sur­prises, son final peu banal, pour sa gale­rie de per­son­nages et sa manière de faire décou­vrir la population.

serge per­raud

Lilja Sigur­dardót­tir, Froid comme l’enfer (Helköld sól), tra­duit de l’islandais par Jean-Christophe Salaün, Métai­lié, coll. “Biblio­thèque nor­dique – Noir”, mars 2022, 288 p. – 21,00 €.

Leave a Comment

Filed under Pôle noir / Thriller

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>