Poète performeur, Sébastien Lespinasse sait de quoi est fait le monde.
Et pour le rappeler, non seulement il l’écrit, mais est prêt à le chanter dans des lieux inattendus comme des laveries.
Proche des pionniers de la poésie sonore (Kurt Schwitters, Tristan Tzara, Isidore Isou), il passe ici à une suite de poèmes notules pour souligner notre conditions, nos envies et vicissitudes. Avant même notre disparition nous sommes des fantômes qui continuent leur itinéraire dans un monde en train de se disloquer — et même si le fantôme du poète a perdu le goût du chou à la crème des années 60.
Mais cela ne l’empêche pas de conserver un flow certain dans ses élucubrations qui ne sont pas forcément des pensées fantômes.
Et il lui arrive de rêver un monde où les sages-femmes sont mieux rémunérées que les fabricants de voiture. Ce qui ne veut pas rien dire.
Cela justifie même le désir de parler en se dégageant de ce qui éloigne. Et qu’importe s’il perd des phrases en son sommeil.
Si bien que — dès lors — le fantôme est bien plus qu’un fantasme même si, dans son labyrinthe, le scénario n’est pas clair mais c’est ce qui en fait le charme.
jean-paul gavard-perret
Sébastien Lespinasse, Traduire le fantôme, Editions Dernier Télégramme, février 2022, 80 p. — 12,00 €.