Sous forme de fable où l’absurde tient la dragée haute, ce livre offre un décryptage de la société tel qu’elle est. Dans ce but, Bacà a inventé le personnage de Kurt O’Reilly, britannique fringant et expert en probabilités.
A la City de Londres, il occupe une chaire enviée au sein d’un institut de statistiques.
Mais, il bénéficie soudain et de manière quasi miraculeuse de la présence d’événements qui lui apportent un lot d’avantages inespérés. L’improbabilité de telles récurrences trouble l’esprit cartésien de l’Anglais.
Sa chance irrationnelle devient moins objet de délice que d’agacement et d’inquiétude.
Pour tenter de trouver des explications, il lui prend la lubie de contacter divers professionnels variés : thérapeutes, chamanes, conseillers en tout genres.
Et ces zélateurs vont mettre le héros sur la voie d’un étrange complot céleste tout à fait dans l’esprit du temps et non sans rappeler L’Amérique de Kafka.
Nous suivons dès lors la tentative du héros pour casser sa ligne de chance et espérer retrouver l’inconnu qui semble être le vademecum de la condition humaine. Cela semble a priori ne pas manger de pain mais Bacà crée sous l’ironie un suspense sourd, pesant et efficient.
Si bien que ce roman pratiquement philosophique devient une charge conséquente sur notre façon d’exister au sein d’un goût de plus en plus appuyé du contrôle.
C’est aussi une manière de rappeler qu’il n’existe pas d’assurance sur la vie.
Elle avance à la va comme je te pousse et c’est ce qui en fait le prix.
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jean-paul gavard-perret
Fabio Bacà, Une chance insolente (Benevolenza cosmica), trad. de l’italien par Nathalie Bauer, Gallimard, Collection Du monde entier, Paris, 2022, 240 p. — 21,00 €.