Avec Le Mur des silences, le romancier propose le quatrième volet consacré à Konrad, cet ex-policier qui s’est mis en tête de retrouver l’assassin de son père.
Celui-ci a été tué, il y a quelques décennies, en pleine rue, près d’une entreprise de fumage.
Eyglo, à la demande d’une femme, se rend dans sa maison car celle-ci ressent anxiété et troubles depuis qu’elle a emménagé. Sur place, Eyglo se sent mal sans pouvoir expliquer l’origine de son malaise, ni sa cause.
Un couple est confronté à d’étranges phénomènes provenant de la buanderie et de la cave. Un soir, elle retrouve son mari sans connaissance au sous-sol. Des fils d’étendage arrachés dans sa chute ont entraîné une partie de cloison laissant un trou béant. Lorsqu’elle regarde ce qu’elle pense être du matériau isolant, une épaisse touffe de cheveux apparaît.
Elisa cherche un réconfort auprès du pasteur car son couple traverse des difficultés. En matière de soutien, il lui demande d’être gentil avec lui, sa main sur sa cuisse, sur son sein.
Bonomy a fait le guet et le chauffeur pour un cambriolage. Ce qui l’étonne, c’est l’absence d’informations dans la presse comme si la victime n’avait pas averti la police. C’est lui qui travaille à agrandir, chez Elisa et Stan, la buanderie et à murer un espace vide.
Eyglo, informée de la macabre découverte se souvient du malaise ressenti dans cette maison et en parle à Konrad qui est intéressé par ce fait et mène alors plusieurs enquêtes…
Avec cette série, particulièrement dans ce volume, Arnaldur Indridason se régale avec les non-dits, les silences, les choses tues ou dissimulées parce que ce n’est pas le moment, parce qu’il faut savoir comment le dire.
Et comment raconter, à froid, des actions réalisées, des événements vécus dans des moments de crise, dans des situations dont le contrôle échappe ?
On retrouve la plupart des protagonistes croisés dans les tomes précédents et quelques nouveaux qui sont particulièrement intéressants. Ce ne sont pas des parangons de vertus mais leur profil, leur caractère finement conçu, développé, donne des personnages de chair et d’os. L’auteur multiplie les intrigues et développe des péripéties nouvelles en plus de l’enquête menée par le héros pour son compte personnel, enquête dans laquelle, d’ailleurs, il se prend les pieds.
Des documents relatifs à ses premières déclarations, à celles faites par sa mère à l’époque, réapparaissent et montrent des contradictions. En effet, Konrad, dont le romancier dévoile la vie et ses turpitudes n’est pas un Chevalier blanc. Son existence comporte des zones d’ombre, des éléments cachés, voire dissimulés, ou tus.
Mais l’auteur installe aussi ses intrigues dans d’autres lieux, donnant à suivre de nouveaux protagonistes qui vivent également des turpitudes. Il met en scène la violence faite aux femmes, le viol des enfants, les pratiques sexuelles peu ragoûtantes, sans consentement.
Toutefois, il ne s’attarde pas à décrire ces actes, se bornant à les évoquer, les suggérer plutôt que d’entrer dans des détails.
S’il s’attache à étoffer de nouvelles recherches, le romancier garde toujours, comme un fil rouge, Konrad dans sa quête d’indices. Et, celui-ci progresse bien que la conclusion ne fera pas l’objet du dénouement de ce tome. Il faudra attendre encore un peu.
Cela dit, les intrigues fonctionnent parfaitement et présentent un bel intérêt tant pour l’atmosphère qui les entoure que pour la richesse de caractères des protagonistes et la tension qui s’installe. L’auteur se garde bien cependant de faire la différence entre passé et présent, ce qui peut dérouter quelque peu.
Un volume passionnant qui peut tout à fait se lire indépendamment des précédents car Indridason replace, de belle manière, les cadres et le contexte.
serge perraud
Arnaldur Indridason, Le Mur des silences (Pagnarmúr), traduit de l’islandais par Éric Boury, Métailié, coll. “Noir”, février 2022, 336 p. – 22,00 €.