A qui ignore la prose et la poétique d’Aure Meury, l’entretien qu’elle propose est la plus belle propédeutique. Comme elle l’indique, elle est pleine de vices : mais qu’on se rassure, il s’agit de vices de procédures qui font au besoin le calembour bon mais pas seulement.
Mère digne quoique désalcoolisée puisqu’elle a renoncé au Sidi Brahim, elle est parfaite insoumise mais pas du genre clowns (Pipo ou Mélenchon). Pour preuve, elle est la seule écrivaine à honorer Campistron — n’en déplaise à Voltaire.
Plus forts que ce dernier dans sa poésie, les volts errent en refusant de suivre le courant continu. Il n’en faut pas plus pour la placer d’office au rang rare des irréguliers et lierres de la langue. D’autant qu’avec une telle fille du chèque, Tonton Cristobal est de retour. Tati lui-même et son oncle n’ont qu’à bien se tenir.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
La police gentilée qui frappe du droit légal à la porte
Avant de me la laisser à réparer sous prétexte de vice
Et pas que dans la procédure.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
D’en avoir toujours
Dont des filles à mon tour
Au nombre de trois.
A quoi avez-vous renoncé ?
À Sidi
D’en faire leur père.
D’où venez-vous ?
D’un claquement de soi.
Qu’avez-vous reçu en “dot” ?
Un lot de blagues éculées
D’oncles et de collatéraux
dont les dommages question effet
Ne sont pas des plus beaux.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
Me surprendre me dire que je suis vivante
À discrétion de toutes les morts qui guettent
Quotidiennes ou non.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres artistes ?
Rien de plus que des autres humains.
Quelle part le vélo possède-t-il dans votre oeuvre ?
Celui qui dans la tête
pédale dans la semoule.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Ma présence auprès d’un gentilé
Que le père voulait faire chanter.
Et votre première lecture ?
Des pages plutôt qu’un livre
Éparpillées après les puces
Léda et son cygne
En rehauts de sanguine
Des taches de café
Pour signer le tout.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Autant de chansons pop
D’ici à jusqu’à pépé.
Quel est le livre que vous aimez relire ?
La double compta.
Quel film vous fait pleurer ?
La vieille petite bobine Super 8
Du mariage de la mère
C’est parce qu’elle est collée
Qu’elle me fait pleurer.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
J’ai la trente-cinquaine
Mais une trente-cinquaine de Moyen Âge
Pour l’an mil l’équivalent du troisième.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Campistron.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
La maison.
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Ceux qui me touchent.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Une carte cadeau en week-end éden événementiel
Avec le ticket pour se faire rembourser.
Que défendez-vous ?
D’approcher
Mais ça marche jamais.
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Avec l’oncle c’est pas tous les jours l’amour
Sauf que par malheur prononcé magie
J’ai toujours ce qu’il veut.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Un résumé de ma vie.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Pouvez-vous attendre le quinze du mois pour encaisser le chèque ?
Présentation et entretien réalisés par jean-paul gavard-perret pour leitteraire.com, le 23 mars 2022.