Paul Fournel adore les héros qui le sont si peu ou si mal. Et son Ray Duluc (ah! ah! ah!) ne festoie qu’assis entre deux chaises. On le croit dangereux eu égard aux meurtres, vols de pâtisseries (cookies, flans), faux en écriture, attitude trouble sur le darknet et les sorties d’école.
Bref, il n’a rien d’une élite mais, comme le dit une commissaire, “ça n’en fait pas pour autant un coupable — en tout cas pas coupable de ça.”
Le pas ça du pas sage fait du roman un passage obligé pour faire de ce roman noir un thriller volontairement raté.
Entre farce et angoisse, Fournel mitonne ce dont il est le spécialiste : un solde de ton conte.
Celui qui se veut espion et taupe dormante n’y voit goutte. A tous les sens du terme, il devient ce que Facebook et autre réseau nous a appris : un follower.
Il croit agir mais sans la moindre conviction, motivation et pertinence. On finira forcément par, cible idéale, lui tirer dessus.
S’ensuivra une apocalypse entre incompréhensions ludiques et terreurs sans objet. Et Fournel offre ainsi la plus belle critique du monde d’aujourd’hui où le virtuel urbanise le réel entre transferts et tâtonnements.
Maître en contradictions, l’auteur nous ravit dans un jeu de bascule et de circuits biaisés dans lequel le lecteur erre comme Ray aussi aveugle que Charles.
jean-paul gavard-perret
Paul Fournel, Attends voir, P.O.L éditeur, Paris, 2022, 160 p. — 16,00€.