Jean-David Morvan, Bruno Bazile & Annelise Sauvêtre, Les Enquêtes de Victor Legris – t.01 : Mystère rue des Saints-Pères

Un pre­mier tome très prometteur

Les enquêtes de Vic­tor Legris, la série de Claude Izner nom de plume des sœurs Liliane Korb et Lau­rence Lefèvre, débutent en juin 1889.
L’Exposition Uni­ver­selle bat son plein et la tour Eif­fel, qui vient d’être inau­gu­rée, en est la prin­ci­pale attraction.

Victor n’a pas encore trente ans quand il hérite de la librai­rie Elze­vir que tenait son oncle, rue des Saints-Pères, à Paris. Pas­sionné par son métier, il est éga­le­ment attiré par la pho­to­gra­phie nais­sante et par la réso­lu­tion d’énigmes. Il devient enquê­teur pour pro­té­ger Kenji, son asso­cié, qu’il consi­dère comme son père adop­tif.
Pour cette série, forte de douze volumes (Édi­tions 10/18), les auteurs s’appuient sur des faits divers étranges, en géné­ral éton­nants mais réels, qui nour­rissent une intrigue d’une excel­lente fac­ture, impli­quant de près ou de loin des proches de Vic­tor. Paral­lè­le­ment à ces enquêtes, Claude Izner déve­loppe une véri­table saga domes­tique avec une aug­men­ta­tion signi­fi­ca­tive du micro­cosme fami­lial. Chaque livre est aussi le pré­texte pour explo­rer un quar­tier pit­to­resque, pour en faire une visite très docu­men­tée. Cette série se dis­tingue par la qua­lité et la pré­ci­sion quant à la recons­ti­tu­tion de l’époque, par la richesse des des­crip­tions. Le style, l’écriture, la richesse du voca­bu­laire et des images lui donnent une tona­lité par­ti­cu­lière, une authen­ti­cité peu commune.

Vic­tor a été convié par Marius Bon­net, le direc­teur du Passe-Partout, à fêter le cin­quan­tième numéro du quo­ti­dien sur la tour Eif­fel. Préa­la­ble­ment, un chif­fon­nier a été piqué par ce qu’il prend pour une abeille alors qu’il trie un tas de déchets. Il décède très vite. Une scène iden­tique se déroule presque sous les yeux de Vic­tor. Une gou­ver­nante, en charge de deux enfants, meurt après s’être plainte d’une piqûre.
Deux choses vont alors bou­le­ver­ser la vie du héros. D’abord, il ren­contre Tasha, la cari­ca­tu­riste du jour­nal, qui va l’entraîner dans une quête amou­reuse tumul­tueuse. Puis, l’attitude de Kenji qui mani­fes­te­ment veut dis­si­mu­ler quelque chose. Pour le pro­té­ger, pour veiller sur lui, Vic­tor va se lan­cer dans une enquête dont il est loin de soup­çon­ner les implications.

C’est Jean-David Mor­van qui assure le pas­sage de ce roman en scé­na­rio de bande des­si­née et, comme il en a le secret, il res­ti­tue à la per­fec­tion l’esprit et l’atmosphère du livre. Il donne à l’intrigue de nou­velles lettres de noblesse et campe avec brio un per­son­nage très atta­chant.
Ce pre­mier volet, Mys­tère rue des Saints-Pères, place le décor, pré­sente les prin­ci­paux acteurs dans le cadre d’une intrigue astu­cieu­se­ment menée jusqu’à une chute sur­pre­nante. Le récit se déve­loppe autour de ce héros à la fra­gi­lité tou­chante, autour d’une série de morts mys­té­rieuses tant dans leur cause que dans la liste des vic­times. On trouve éga­le­ment beau­coup d’intérêt à suivre les fils d’une intrigue amoureuse.

Cette his­toire est l’occasion d’une recons­ti­tu­tion détaillée, éton­nante de la vie des artistes avec Tasha, du tra­vail des jour­na­listes d’un quo­ti­dien à tra­vers l’équipe du Passe-Partout, d’une renais­sance d’expressions popu­laires, d’objets et de métiers oubliés.
La mise en images est due à Bruno Basile qui retient une pré­sen­ta­tion qui oscille entre réa­lisme et cari­ca­ture, allant cepen­dant à l’essentiel pour expri­mer les sen­ti­ments, les émo­tions, les faits et les situa­tions. Il a mené un tra­vail appro­fondi tant pour les acces­soires et vête­ments que pour les décors qu’il syn­thé­tise de belle manière. Les cou­leurs d’Annelise Sau­vêtre, assis­tée par Tho­mas Ler­gen­mul­ler, apportent une touche fort agréable à l’ensemble.

Les auteurs réa­lisent, cha­cun dans leur domaine, une belle adap­ta­tion d’un roman dont l’intrigue est fas­ci­nante jusqu’à un dénoue­ment fort surprenant.

serge per­raud

Jean-David Mor­van (scé­na­rio adapté d’un roman de Claude Izner), Bruno Bazile (des­sin) & Anne­lise Sau­vêtre, assis­tée par Tho­mas Ler­gen­mul­ler (cou­leurs), Les Enquêtes de Vic­tor Legris - t.01 : Mys­tère rue des Saints-Pères, Phi­léas, novembre 2021, 88 p. – 15,90 €.

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