Dans la forêt obscure
Au milieu du grand large du quotidien, entre les êtres et les paysages existent les chiasmes ou des ressemblances qui nourrissent le travail d’Antonio Denti.
De son nom à celui de Dante, il n’y a qu’un pas — d’où cette reprise par l’image d’une expression d’ouverture de La Divine Comédie : “dans la forêt Obscure”.
L’artiste entre dans la ville comme Dante dans l’enfer. Il a commencé cette série en une période d’errance et de doute.
D’où l’aspect quasi néo-réaliste d’un travail effectué en marchant dans au crépuscule eu moment où le ciel est encore éclairé tandis que, peu à peu, l’obscurité efface les contours des paysages.
A l’aide d’éclairage de fortune (lampadaire, vitrine, phares), il a réalisé chaque portrait entre chien et loup moins pour saisir le contexte urbain ou péri-urbain que la force et, dit le photographe — “le miracle” de visages plus ou moins perdus dans “l’immonde cité” (Baudelaire).
Le titre inattendu de la série vient du fait que Denti imaginait prendre ses photos comme s’il les avait saisies dans l’antarctique : face à la puissance de la nature et à l’indifférence du monde.
Et l’artiste d’ajouter : “En cette époque orageuse pour moi, j’essayais de photographier l’immense fragilité et l’immense force, l’agitation et la résilience du passager humain”.
Il a réussi.
jean-paul gavard-perret
Antonio Denti, Antartica, 2022.