L’ouvrage se compose de trois chants en poèmes en prose. Dieu s’y incarne dans l’encre en une sorte de crépuscule où se mixent commencement et fin.
Chaque page peut être lue comme un fragment poétique autonome. S’y mêlent l’humilité et l’incertitude à la grandeur et la foi.
Souvent le lecteur est directement interpellé, parfois l’écriture se commente elle-même et le langage fait l’objet d’un traitement de plus en plus vertigineux.
Les phrases sont plutôt courtes mais leurs assemblages créent des sinuosités acrobatiques.
Existe là un refondation, une reconstruction là où le lyrisme devient une constante. Certains le prendront à tort pour une fantasmagorie débridée.
Pour autant, Biscarrat n’abuse d’aucun effet.
Il porte ici sa vocation et le destin des hommes au nom d’une sagesse qui dépasse l’amour seulement terrestre dans un diapason qui n’appartient qu’à lui. Il est l’inverse d’un Maldoror et lutte pour la sauvegarde des naufragés que nous sommes.
Il se jette résolument dans la carrière de l’idéal et faisant résolution de suivre la route du coeur et de la spiritualité. Une telle attitude procède d’un puissant orgueil mais aussi d’une immense souffrance avec la volonté de la transcender.
La passion est d’atteindre à l’infini par les moyens d’une poésie de fondement, fruit d’une révolte. Le langage se fait ardent et offre au coeur de la nuit la luminosité la plus grande. Celle d’une révélation.
Thibault Biscarrat cherche ainsi l’envoûtement exercé par chaque texte. Contre le scepticisme et le nihilisme s’instruit une fabuleuse aventure du langage lyrique. L’écriture exprime parfois la difficulté d’exister mais dans l’impérieuse nécessité de se sauver.
D’où cette euphorie poétique, ce maniement du verbe à la fois débridé et retenu.
La polysémie y cohabite avec incandescence à la fois au milieu du cosmos et au plus près de l’être.
jean-paul gavard-perret
Thibault Biscarrat, L’initié suivi de La libre étendue et L’incandescence, Editions Ars Poetica, 2022, 90 p. — 18,00 €.