Edith Azam est sans pitié pour elle-même. Elle demeure “impossible à (é)clore” et “marécage” que la langue ne sèche pas. Elle reste aussi foetus mais avec dedans quelqu’un qui meurt — Beckett aurait appelé cela “foetus de non vie”.
Elle l’énonce dans une poésie quasi spatialiste. Dès lors, l’effervescence et la bouillie des mots font que le souffle s’exprime en dedans en faisant des percussions sur les os du squelette.
Mais la poétesse tente de sortir de la saturation de la chair par l’envol des mots afin de sauver de la pensée dans le territoire du poème.
Il devient parfois vertical pour ausculter et fendre le corps et ses masses autonomes afin que les mots en sortent.
En conséquence, la poésie se fait scalpel pour racler non seulement le superfétatoire mais aussi l’essentiel. D’où les pointes de la langue pour scruter la dimension interne du corps et son noir dedans même si la chair bataille contre eux.
Mais il s’agit de la “dessouder” car, à force, craque l’écorce par les mots tueurs.
Reste néanmoins l’espoir pour que les bouts de vie se poursuivent en l’insoumission que la parole produit en gravitant dans le squelette. “Ecrire” reste donc la question.
Jusqu’à un devenir “air” en insurrection d’images-graphiques et dans un duel où l’être reste toujours seul avec lui-même, en appeau de ce qui arrive : à savoir, un corps qui après avoir tant remué se heurte à sa finale “impossibilité”.
jean-paul gavard-perret
Edith Azam, Mon corps est un texte impossible, Atelier de de l’agneau, St-Quentin-de-Caplong, 2022, 106 p. — 18,00 €.