Cécile Cabanac, La Petite Ritournelle de l’horreur

Que de sombres secrets der­rière des murs

Avec son couple de héros, la roman­cière explore les domaines où sévit la cri­mi­na­lité, sans langue de bois ni amoin­dris­se­ment des faits et situa­tions. Elle met en scène des êtres de chair et de sang, mêlant intiment les sou­cis de leur vie pri­vée et les affres de la vie pro­fes­sion­nelle, l’angoisse géné­rée par les enquêtes.
Elle dépeint avec pré­ci­sion, avec exac­ti­tude le quo­ti­dien de ces poli­ciers confron­tés à des drames, à des corps démem­brés, lacé­rés, poi­gnar­dés, torturés.

L’homme, qui s’est rendu acqué­reur d’une vieille mai­son, il y a trois mois, veut abattre une cloi­son pour agran­dir la pièce. Il découvre le corps putré­fié d’une jeune ado­les­cente. La com­man­dant Vir­gi­nie Sevran et Pierre Bio­let sont char­gés de l’enquête. Quand ils arrivent sur les lieux, trois petits cadavres, n’ayant qu’une chaus­sure au pied droit, sont ali­gnés sur le sol. Un gar­çon porte les restes d’un maillot de foot qui rap­pelle une vieille his­toire à Pierre Bio­let, quand il était à Clermont-Ferrand.
Pas­sant outre la sidé­ra­tion et la vision d’horreur, ils com­mencent des inves­ti­ga­tions. La mai­son a été ache­tée à Made­leine Duf­flot, 76 ans, qui vit en Ehpad. Mais, elle est décé­dée depuis deux semaines, ne pos­sé­dait rien à son arri­vée, sans liens fami­liaux, mais sous tutelle.

Émi­lie Lachare a cinq enfants, tous pla­cés car elle ne pou­vait pas s’en occu­per. Mais elle sait où ils sont, sauf un qui a dis­paru. Et cette absence l’accable.
Damien Couard est agent de sécu­rité. Il n’a pour com­pa­gnie que sa chienne, Cheyenne. C’est en contrô­lant les docu­ments d’une livrai­son qu’il devient tout pâle. Sur la petite télé­vi­sion du chauf­feur, il voit le repor­tage sur la mai­son et les décou­vertes macabres. Or, il y a vécu des années noires sous la coupe de Made­leine, une femme sèche et mauvaise…

Dans le pré­sent roman, elle inté­resse les lec­teurs à l’univers des enfants reti­rés de leur famille, à des parents sou­vent bien débous­so­lés, des femmes qui se retrouvent iso­lées avec une tribu issue de nom­breuses ren­contres. Elle décrit le sys­tème de l’Aide à l’enfance, pointe ses réus­sites mais aussi ses carences répé­ti­tives par manque de moyens, par négli­gence, par las­si­tude, par aveu­gle­ment.
Certes, ce n’est pas un domaine où l’argent du contri­buable déborde comme dans cer­taines concen­tra­tions d’élus ! Elle pointe éga­le­ment l’épuisement face à ce flot inin­ter­rompu à gérer dans des condi­tions difficiles.

Avec Vir­gi­nie Sevran et Pierre Bio­let, elle anime un duo qui fonc­tionne à la com­pli­cité. Ils sont moti­vés par les mêmes objec­tifs, se retrouvent sans peine pour détec­ter men­songes, omis­sions ou semi-vérités.
Autour de ce couple de col­lègues, elle anime une belle troupe de pro­ta­go­nistes bien repré­sen­ta­tifs des rôles qui leurs sont assi­gnés. Elle pro­pulse tout ce petit monde dans une intrigue fûtée, évo­luant dans une atmo­sphère délé­tère où la vio­lence règne en maîtresse.

Avec La Petite Ritour­nelle de l’horreur, Cécile Caba­nac signe un roman dur, noir, avec des scènes bru­tales, aux rebon­dis­se­ments inces­sants jusqu’à un dénoue­ment terrible.

serge per­raud

Cécile Caba­nac, La Petite Ritour­nelle de l’horreur, Fleuve Édi­tions, coll. “Thril­lers”, jan­vier 2022, 480p. – 19,90 €.

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Filed under Pôle noir / Thriller

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