Marie Benedict, La femme qui en savait trop

Une scien­ti­fique bien oubliée en tant que telle !

Sans la décou­verte déci­sive de cette dame, nous n’aurions sans doute pas ce télé­phone por­table qui est devenu, pour cer­tains, le pro­lon­ge­ment de la main.
Rédigé à la pre­mière per­sonne du sin­gu­lier, telle une auto­bio­gra­phie roman­cée, Marie Bene­dict relate les grands évé­ne­ments de la vie d’Hedy Lamarr de mai 1933 à sep­tembre 1942.

En mai 1933, Hed­wig Kies­ler, triomphe dans le rôle de Sissi, l’impératrice autri­chienne Éli­sa­beth, au théâtre de Vienne, en Autriche. Cette jeune comé­dienne séduit Frie­drich Maudl, le pro­prié­taire d’une usine qui fabrique des muni­tions et des armes à usage mili­taire. Il la couvre de fleurs et charme ses parents qui voient, dans ce mariage, la mise à l’abri, pour elle et sa famille, des per­sé­cu­tions anti­sé­mites.
Les pre­miers mois se déroulent presque comme un conte de fée même si Fritz lui demande de ne plus jouer la comé­die et de se consa­crer à son rôle de maî­tresse de maison.

Hedwig a tourné dans Extase, un film tché­co­slo­vaque, une romance/drame où elle avait un rôle éro­tique… voire scan­da­leux pour l’époque. C’est en 1934 que Fritz décide de pro­je­ter ce film, sans en connaître le contenu, à l’issue d’un dîner devant un public de col­la­bo­ra­teurs, de hauts fonc­tion­naires et finan­ciers ita­liens. La pro­jec­tion est vite inter­rom­pue. Il veut rache­ter toutes les copies, séquestre son épouse, n’autorisant que quelques sor­ties sous haute sur­veillance. C’est alors qu’elle décide de fuir. Mais elle est bien dému­nie pour mener son pro­jet à terme.
Il fau­dra une suite de cir­cons­tances pour qu’elle réus­sisse en 1937.
Après un pas­sage en Suisse, quelques temps en couple avec Erich Maria Remarque, elle ren­contre Louis B. Mayer à Londres et débute sous le nom de Hedy Lamarr une car­rière à Hol­ly­wood. C’est pen­dant des repas avec des clients de son époux qu’elle entend par­ler des dif­fi­cul­tés pour contrô­ler à dis­tance les tor­pilles, le sys­tème du filo­gui­dage ayant ses limites. Pour aider les États-Unis dans leur com­bat, elle met au point, avec le com­po­si­teur George Antheil un sys­tème repo­sant sur des sauts de fré­quence. Ce pro­cédé n’est pas retenu. Il faut attendre les années 1950 pour que des bateaux en soient équipés.

Le livre fait une large place à la période moins connue, moins média­ti­sée de son exis­tence. Si le récit est une œuvre de fic­tion, il s’appuie sur des faits et des pro­ta­go­nistes his­to­riques. Certes, toutes les scènes intimes, les échanges dans le couple, ceux lors des dîners et récep­tions relèvent de l’imagination de Marie Bene­dict. Cepen­dant, celle-ci sait mettre en scène, don­ner une dimen­sion de réa­lité aux dif­fé­rentes étapes de l’existence d’Hedy. Elle en donne un bel aperçu, avec de tels accents de vérité, si bien que qu’on peut faci­le­ment ima­gi­ner que ces scènes, se sont réel­le­ment dérou­lées, que ces pro­pos ont été effec­ti­ve­ment tenus.
La vie d’Hedwig n’a pas été facile et la roman­cière montre la pug­na­cité de cette jeune femme qui se marie alors qu’elle n’a pas 19 ans, qui fait face à des situa­tions dif­fi­ciles. Elle veut com­battre le nazisme, aider les États-Unis dans leur effort de guerre avec un pro­cédé révo­lu­tion­naire. Mais, celui-ci n’est pas pris au sérieux par la flo­pée de béo­tiens des États-Majors. Com­ment pouvaient-ils conce­voir qu’une femme puisse être belle et intel­li­gente ? Cela a dépassé leur pauvre QI !

Avec ce livre, Marie Bene­dict fait revivre les années peu connues d’une immense star, dans un récit enthou­sias­mant, riche en infor­ma­tions et décou­vertes sur cette femme d’exception.

serge per­raud

Marie Bene­dict, La femme qui en savait trop (The Only Women in The Room), tra­duit de l’anglais (États-Unis) par Valé­rie Bour­geois, Édi­tions 10/18, coll. “Lit­té­ra­ture étran­gère”, octobre 2021, 336 p. – 7,80 €.

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