J-B Hanak, Sales chiens

Chienne de vie et che­min de hallage

JB Hanak est musi­cien, auteur et plas­ti­cien. Avec Fré­dé­ric Hanak, ils ont créé le groupe “dDa­mage”. Bap­ti­sés par la presse musi­cale, les « Mou­tons noirs de la French touch », ils ont été recon­nus et salués pour leur par­cours artis­tique sans conces­sion. Sales chiens est son pre­mier roman. Mais il résonne déjà comme sa musique et ses oeuvres plas­tiques.
Bref, il dépote dans cette bio­gra­phie d’un groupe rock alter­na­tif et ce que cela soup­çonne de galère.

Le livre est grouillant, inci­sif, violent mais plein d’amour car le per­son­nage cen­tral est celui pour qui a été créé le livre : Fred. “Mon grand frère, c’est Fred. La per­sonne que j’aime le plus au monde. On fait de la musique depuis l’enfance. Deux gamins de Maisons-Alfort ; on a tout fait ensemble depuis le début. Notre pre­mier album est sorti début 2000. Fiers de tous nos disques, nous avons enchaîné labels miteux, tour­nées de bras cas­sés, ventes minables et pro­mo­tion zéro. Dix années bien tas­sées à man­ger de la vache enra­gée”.
Ce livre les retrace comme il rap­pelle avec de nom­breux détails l’enfance en ban­lieue auprès de ce frère plus âgé de cinq ans. “Lorsqu’on était gosses, son meilleur ami à l’école était un fils de flic. On raf­fo­lait de toutes les his­toires tor­dues que ce mec tenait de son père.” Dont celle du chien invi­sible — Ourko — qui va deve­nir le fil rouge d’un livre où d’autres chiens (fran­çais, bri­tan­niques mais pas seule­ment) plus visibles vont venir don­ner du mor­dant à une his­toire qui par­fois s’en serait bien passée.

Mais ainsi va la vie de rocker. Beau­coup aurait fini par perdre les pédales mais Hanak a tenu. Et son livre nous menotte à la lec­ture. Les mots s’y font par­fois cyclones mais néan­moins tout est tenu, monte en ten­sion, fait gueu­ler les chiens et pas seule­ment les flics “à tête de bou­le­dogue”. D’autant que l’auteur ne livre pas un brû­lot ras du bitume. Il a mieux à faire même si le gou­dron le rap­pelle à lui. Mais l’auteur dans ce roman des fos­sés et des for­ti­fi­ca­tions domine son sujet — bref, il sait écrire.

D’où l’aspect road-movie d’une telle his­toire avec pas mal de mange-merde et de cre­vards sans scru­pule qui font du blé en ven­dant les disques d’un mort. Et pas n’importe lequel. C’est le frère tant aimé. Et dont le nar­ra­teur espère le retour impos­sible. “Oui il fau­drait qu’il rap­plique au plus vite. Au besoin avec une arme. Fred, je te jure, t’es la der­nière per­sonne à qui je pense (..) y a per­sonne de plus impor­tant que toi dans ma vie, Fred, t’es mon grand frère.“
Si bien que le livre se referme comme il a com­mencé. Dans une immense boucle musi­cale. C’est for­cé­ment quasi génial.

Hanak ne triche pas. Et ce, dans — sous cou­vert de retour vers le passé — un roman de filia­tion et d’anticipation où Ourko lui-même va retrou­ver son chemin.

jean-paul gavard-perret

J-B Hanak, Sales chiens, Léo Scheer, Paris, Jan­vier 2022, 272 p.

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Filed under Chapeau bas, Romans

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