Tout en fugues et en traces, ce road-movie est autant un roman de formation non sans adéquation sur les problématiques actuelles d’identité et d’identification.
Nous suivons ici celle qui porte tout son monde sur son dos telle une guerrière des temps modernes et qui connaît le prix du sang.
Il n’empêche que dans ce périple il lui arrive de découper les images de sa vie qui avance avec des ciseaux d’enfants. Si bien qu’elle n’est pas toujours de plain-pied dans son existence tant il existe de résistance plus ou moins inconsciente là où traîne une image d’un père omniscient.
Pour preuve, même en montagne il n’y a pas de neige quand il n’y a pas de papa.
Et c’est ce qui rend ce roman pudique comme un coup d’épée. Mais pas dans l’eau. D’ailleurs un roman de formation comme un road-movie est fait pour se délester des souvenirs, éviter des genres acquis, même si parfois participer à une telle épreuve peut tourner au jeu de dupe. A chaque personnage du livre de l’assumer là où d’une manière tout est attendu — mais dans le genre c’est bien.
Puisque les histoires d’amour finissent mal en général. Mais, pour une fois, la femme n’est pas l’innocente victime sans pour autant devenir la lionne chasseresse des sleepings.
Celle qui avait envie de pleurer a soudain envie de rire. La Bretagne est propice à ces changements même pour une héroïne parfois fatiguée d’être féminine, puis déclarée androgyne et qui se libère au milieu des joncs en caressant de l’esprit un bel amour saphique.
jean-paul gavard-perret
Elsa Royer, Dissection d’une fuite, éditions Sans Escales, Paris, novembre 2021, roman, 273 p.