Quand le visuel entretient un rapport avec le crime
Il existe dans la peinture d’Axel Pahlavi une rhétorique du silence des corps. En dépit de leur jeunesse, ils sont en déréliction, coulées, mirages et sont saisis par l’artiste de manière frontale et dans une lumière aussi nue qu’eux-mêmes. Chaque femme devient l’insomniaque rêveuse soumise à l’immobilité des statues en un pur spectacle où l’image s’enfonce en harmoniques dans une narration implicitement dramatique dans un montage de fragment et hybridations de divers motifs de diverses provenances ou échelles.
Se mêlent culture iranienne et européenne, traditions et modernités, réalisme et mysticisme.
Rien ne manque mais tout est absence, suggestion. Le corps — se sentant s’effriter — en oublie l’existence du désir. Néanmoins, celui-ci rampe, émerge subtilement en dépit de l’épuisement et sous les apparats d’une fête promise mais qui n’a pas eu lieu. Si bien que ni le possible, ni l’impossible ne sont des garde-fous. Tout est instauré en attente sans véritable but.
S’éprouve tout le creux de l’existence. La femme est en elle sans y être. Ouverte, fermée. Pudique, impudique.
Ceux qui la trouvent obscènes et la condamneraient ne comprendraient rien à une telle peinture. S’y s’élabore l’incantatoire de l’Imaginaire paradoxal de Pahlavi où se croisent croyances et désillusions, idéal et de dépravation, beauté et laideur, désir et renoncement.
Axel Pahlavi prouve comment l’obsession de la matière unique du corps est traitée non comme concept mais en tant qu’existence corrodée
L’identité demeure sous forme dubitative là où la narrativité psychologique fait place à la fable. Tout avance caché, presque inexprimable. Comme si l’artiste savait qu’en ses modèles existait un être assassiné.
Le visuel entretient ici un rapport avec le crime. Le corps pourtant reste au seuil de la ténèbre au sein d’une clarté si blanche qu’elle peut sembler irréelle.
jean-paul gavard-perret
Axel Pahlavi, Solo Show, Galerie Isabelle Gounod, Paris, du 4 décembre 2021 au 22 janvier 2022.