Les textes qui forment le cahier Expérience ont été conçus pour la publication virtuelle sur la Toile. Ils sont donc un exercice de la vélocité, au présent. Cela n’enlève en rien le travail de reconstruction du livret depuis le manuscrit, réservé exclusivement au Web. J’ai pensé que cette aventure littéraire en ligne se rapprocherait peut-être de l’écriture de Pacific 231, sorte de calque de la musique savante sur un objet de la modernité, ici dans le sens inverse, créée pour, vers une technologie comme support.
Je travaille donc au fur et à mesure pour livrer ces textes, qui sont des points de vue parfois abstraits sur ma connaissance du monde.
Tu dors, mon âme appesantie
Christofle de Beaujeu
Comment justifier le temps de ma vie intérieure. Car ces moments sont embrasements, moments de souffle, solide impression d’être entier, plus que moi-même.
Le poème en témoigne.
Périodes, jours, après-midis, tensions. Application, fièvre, ordre mystique.
Cela balance en moi, comme si je pouvais atteindre une présence dans ma présence au monde.
Sentier. Route. Chemin. Sente. Déambulation. Déplacement. Mouvement. Esprit meuble. Quête. Suivre une sente. Une voie escarpée. Un paysage de pierre. Journée.
Suspens du temps. Chaussée intérieure. Et mille fois confiance dans mon poème.
Cet état de moi-même, qui reste un état commun à chacun, à tous, fréquente l’atmosphère gazeuse de la pensée — et la pensée est à tout le monde.
Simplement elle n’est tributaire que d’elle-même, de sa puissance, de l’intelligence de la personne.
La différence c’est la sensibilité au vocabulaire, choisir le mot exact. Rallier en moi le chant de l’âme. Car les mots sont mots de l’âme.
Une conception uniciste. Une pensée uniciste.
Il faut seulement partager, rompre le pain du langage, donner, répondre de soi.
Ai-je raison ? Suis-je ? Chaque minute est table rase. Un peu de poussière.
Aller. S’acheminer. Se mouvoir. Traverser. Pénétrer. Avancer. Marcher. Progresser. Aboutir. Tous les écueils parlent de la même voix.
C’est déambuler, l’acte même de la déambulation qui fait le layon. Dernière porte à franchir, ultime huis de lumière.
Errance ? Promenade en soi. Le carnet ici s’en ressent. Dansant. Ballant.
Regardant matériellement, comme un regard double. Le manuscrit et le livre. Saisir l’épissure, le joint, l’alliance.
didier ayres