Voici une nouvelle enquête de Grand Détective et de son fidèle adjoint et biographe le Dr Watson. Ce diptyque présente une traque inédite et originale, bien dans l’esprit de la série initiée par Conan Doyle. Mais elle est ahurissante par l’originalité de sa présentation, par sa mise en images absolument fabuleuse.
Si l’intrigue est insolite avec un thème singulier, les rebondissements et des péripéties nombreuses et variées, c’est surtout la mise en images, l’agencement des planches, la disposition de tous les éléments que cette histoire interpelle.
Une série d’enlèvements a lieu dans des quartiers défavorisés de l’East End à Londres, sans émouvoir Scotland Yard. Lorsque le Dr Fowler est retrouvé errant en chemise de nuit, il est soigné par le Dr Watson. Des éléments intriguent Sherlock Holmes comme ces traces de poudre sur les vêtements et, dans sa poche, un ticket de spectacle pour le numéro de Wu-Jing, un mage chinois.
Il prend l’affaire en main. À partir de quelques témoignages, il constate que les victimes ont un point commun, tous ont des cheveux et des yeux clairs. De plus, toutes ces personnes ont été en contact avec Wu-Jing.
Holmes recherche l’imprimeur du ticket, ce ticket qui fait scandale. Mettant en œuvre ses facultés exceptionnelles d’analyse, Holmes arrive à identifier l’imprimeur auquel il rend visite illico presto. Le patron reconnaît son travail et indique que le client a laissé ses caractères en chinois. Le détective remarque qu’un homme, à l’attitude étrange, les observe depuis le sommet de l’atelier. Il le prend en chasse lors qu’une course éperdue sur les toits de Londres. S’il le rattrape et se bat avec lui, il le laisse s’enfuir pour suivre sa piste et aller alors vers le chef de la bande. Mais, il subtilise une sacoche où il trouve un baroque assortiment de factures.
Watson a trouvé, chez l’imprimeur, un ticket qui annonce un nouveau spectacle le soir même. Or, cette fois, y assisteront le Secrétaire aux colonies et un explorateur célèbre. Ce sont de hautes personnalités qui sont visées. Holmes est confronté à un criminel qui ourdit un insolite complot aux ramifications bien imprévisibles…
Les auteurs font preuve d’une inventivité peu commune. On est à des années-lumière de la classique page en six ou neuf cases si chère à nombre de dessinateurs. Il faut saluer le travail de mise au point et féliciter l’éditeur qui a accepté de se lancer dans une telle aventure. Si la découpe de la couverture retient l’attention avec le profil de Sherlock Holmes sur le premier tome et celle de son adversaire sur le second tome, à l’intérieur il faut replier des pages pour avoir des infos, regarder par transparence.
Ces planches compilent inventions graphiques, détails nombreux, voire pléthoriques, précis, des trouvailles. On ne sait plus où donner de l’œil tant il y a de choses à voir, de précisions, de pastilles contenant des éléments.
Une excellent nouvelle : les auteurs promettent une prochaine enquête. L’art narratif progresse à grands pas avec de tels auteurs.
Si vous ne devez acheter que quelques albums cette année, n’hésitez pas. Ces deux albums représentent une avant-garde révolutionnaire.
serge perraud
Benoît Dahan (scénario adapté de Conan Doyle, dessin, couleur), Cyril Lieron (scénario), Dans la tête de Sherlock Holmes – t.02 : L’affaire du ticket scandaleux, Ankama, septembre 2021, 48 p. – 14,90 €.