Les textes qui forment le cahier Expérience ont été conçus pour la publication virtuelle sur la Toile. Ils sont donc un exercice de la vélocité, au présent. Cela n’enlève en rien le travail de reconstruction du livret depuis le manuscrit, réservé exclusivement au Web. J’ai pensé que cette aventure littéraire en ligne se rapprocherait peut-être de l’écriture de Pacific 231, sorte de calque de la musique savante sur un objet de la modernité, ici dans le sens inverse, créée pour, vers une technologie comme support.
Je travaille donc au fur et à mesure pour livrer ces textes, qui sont des points de vue parfois abstraits sur ma connaissance du monde.
Une nuit je trouvai une pierre
pierre, oh ! pierre.
Herberto Helder
Les lieux n’existent que par description, par des visions parfois mais qui nécessitent un récit.
Fondamentalement, le lieu est gaz, est poche, croisement — comme le dit le Zen : tu es à un carrefour, alors prends-le ! Tu es en un lieu, alors prends-le !
Et la connaissance donne, ordonne, classe, dissèque toutefois en différents signes : le bureau jaune, la bibliothèque des services de presse, tout cela est signe, signes qu’il faut s’approprier, contenir, restituer en temps voulu, abandonner au désert des choses non vues dès la séance de travail achevée.
L’esprit, seul, en sa majesté, en son idylle.
On pourrait dire que c’est à une lutte que se livrent les lieux, les chambres de la maison, les liens avec le paysage de la rue, de la fenêtre, images grandissant dans la fixité du regard, pour disparaître dès que l’angle de vision est différent, ne fait plus focale. Je pencherais pour Lucrèce et la pellicule du regard sur les choses, que l’on peut aisément comprendre, seul, devant l’huis du bureau, de la chambre, en une sorte de coalescence de choses inertes.
Cette instruction de l’espace, cette résidence, ce théâtre du monde me va comme fiction.
Il est l’objet définitivement appréhendé par l’intellection, par le langage, par le jeu violent de la pensée.
La beauté, l’intelligence, la pensée : trois histoires.
Cet exercice demande une sorte d’immobilité temporaire, ou plutôt une vitesse lente, un appesantissement sur les valeurs et les qualités de l’idiome, où intrigue le lexique, agité par le mystère, l’absent, le manquant.
Donc, aller lentement pour survenir à soi dans la page (page par nature immobile).
Dieu, les hommes, le poème : se tenir pour aimé.
Je suis certain que l’être humain comme la pierre, se définit par l’éclat, l’éclatement de la nature physique tributaire, de la conscience, ce qui veut dire, la vie.
La pierre et l’homme sont combustibles, changent de nature dans le temps.
Dire contient, même si écrire et dire sont différents, écrire étant un plaisir primaire, et dire une école.
didier ayres