La fameuse formule de Winnie :“vieux style”, qui ponctue Oh les Beaux jours, ne peut convenir à l’auteure de ce roman qui pourrait bien être vrai car Maylis Besserie ne part pas de rien.
Elle revisite la fin de vie de Beckett selon et entre autres des informations tirées des deux biographies que deux auteurs anglo-saxons lui consacrèrent et que Beckett prit soin de jeter à la poubelle dès qu’il les reçut.
Mais Malys Besserie sait extrapoler pour créer un univers où l’auteur est présent non sans émotion. Elle crée tout un travail de transbordement qui ressemble — en se reportant bien loin dans l’expérience de l’Irlandais — à ce qu’il demandait face à la langue et son voile.
Il faut le “déchirer afin d’atteindre les choses (ou le néant) qui se trouvent au-delà.”
Comme lui, la créatrice fore des trous, l’un après l’autre, dans cette “fin de partie” jusqu’au moment où ce qui est caché derrière, que ce soit quelque chose ou rien, se mette à suinter à travers.
C’est un bel un idéal pour un écrivain afin que la littérature ne soit plus vouée “aux vieilles coutumes abandonnées depuis bien longtemps par la musique et la peinture” disait Beckett.
C’est parce qu’il n’existe pas de raison valable au déchirement dans le “voile de la langue” et de la vie que ce livre nous parle.
Avec intensité. Au moment où Beckett se confond avec ses personnages.
jean-paul gavard-perret
Maylis Besserie, Le tiers temps, Gallimard, collection Folio (n° 6972), septembre 2021, 224 p.