Inconscient optique
Claudia & Julia Müller scénarisent de grands dessins muraux, des situations familières ou mystérieuses. Elles ajoutent aux représentations figuratives ornements, abstractions, dédoublements, fragments. À partir de leurs archives d’images, elles scrutent les échanges de regards, les rapports de pouvoir, les relations entre affection et animosité.
Bref, elles observent et étudient un grand nombre de contradictions de l’existence humaine.
L’exposition se focalise sur des moments de transitions, des formes de vivre-ensemble, des situations de fragilité et de réorientation à travers des portraits et aussi l’installation de lampes peintes. Pour Julia Müller, une telle pratique artistique reste un moyen de distanciation et d’analyse de la nature humaine est une technique pour accéder à des parties obscures de ses propres pensées.
Chez les deux sœurs, la réactivation des images à travers une répétition manuelle est une manière de stopper ou au moins de freiner le regard dans un monde envahi par l’image photographique.
Il s’agit de réapprendre à reconnaître ce que nous voyons. En choisissant de s’arrêter sur une image précise, les deux créatrices l’analysent en la recopiant et en transformant des données éphémères et immatérielles en un support plus permanent : la peinture murale. Elle permet de regarder l’image différemment dans une sorte d’ “inconscient optique” cher à Walter Benjamin.
Le tout loin des comparaisons nostalgiques ou des jugements sur le développement des moyens de communication et de production d’images.
Pour elles, l’évocation du passé, le goût de l’anachronique est une forme de lucidité pour interpréter le présent. Ses aspects sombres se révèlent uniquement par leur processus de décalage.
Les murs sont recouverts de croquis d’un paysage corporel surdimensionné, habité par de petits dessins figuratifs en noir et blanc
jean-paul gavard-perret
Claudia & Julia Müller, Une brève histoire de baskets sales, Centre Culturel Suisse, Paris, du 17 septembre au 14 novembre. 2021.