Le phénix de la création plastique
Fidèle à des remembrements audacieux et des érections idoines, Jacques Cauda devient la plume et le prince haut de la peinture et des images les plus intimes.
Tout commence ici avec Greco avant de monter bas et tomber en pâmoison par le rêve du sourire et un sourire de rêve même lorsque les images grimacent entre le salace d’un oeil pinéal de l’éros d’un court métrage de Pascal Aubier et les corps verts des cadavres du peintre majeur qui nourrit toujours l’auteur et son travail de peintre.
Ce n’est donc pas un hasard si Greco devint le phénix de la création plastique. Et celui qui n’a rien de platonique (surtout lorsqu’il s’agit de l’amour) redonne au Grec amant de Tolède et à l’image la dignité métaphysique que tant lui ont refusé — religions comprises. Mais lors de son apogée, Jean de La Croix fut jeté aux oubliettes.
Juste retour des choses car Greco aurait su accorder métaphoriquement et fort justement autant de mérite aux branloires pérennes de la Veronica (non Mars mais du roi Henri) qu’à l’ “ardore” de la reine Margot.
Successeur de L’Homme qui rit de Hugo et du Joker de Batman incarné par Jack Nicholson, l’auteur fait une révision des tropes érotiques là où entre Greco et Cézanne un soleil au cou coupé fait le lit de diverses ingénues et de celles qui ne le sont plus. En points, lignes et incisions, à la suite de Gilbert Lély lecteur de Sade, Cauda rassemble un gotha d’artistes.
Au Golgotha, ils ont préféré l’évocation de près ou de loin du mont de Vénus et sa puissance volcanique.
Héritiers du Greco, Bataille, Ridley Scott, Griffith et Bunuel, Hitchcock et Dali, Antoine Caron (peintre des massacres) et Aragon (celui du Con d’Irène plus que de son épouse), Sutter et Nietzsche, Claude Lorrain et Chéreau et bien d’autres encore deviennent les hélix sires de bijoux ravis ou qui sont en passe de l’être car, pour l’auteur, le “ça va venir” reste une certitude. Que ce soit Eros et Thanathos.
Ils demeurent notre tasse de thé en notre “branloire pérenne” de Montaigne là où ruissellent papillons et papilles, hosties et Ostia pasolinienne.
Dans ces épisodes le sourire qui mord verticalement reste l’incarnation de l’essence humaine mi-oiseau mi-porc.
L’irruption du corps à tout coeur vaillant devient la bafoueuse du Sinaï à mesure que la femme et son fruit s’approchent et que les artistes s’en emparent.
jean-paul gavard-perret.
Jacques Cauda, Camera Greco, Marest Editeur, en librairie le 23 septembre 2021, Paris, 104 p.