Méditation sur la vision et le visible
La collection « Écrits d’artistes » entend redonner la parole aux artistes car ils sont les premiers à pouvoir préciser leur travail.
Cet ouvrage rassemble des entretiens et de textes écrits par Bernard Moninot depuis sa première exposition en 1971, à l’âge de 21 ans, jusqu’à aujourd’hui.
Son travail se dirige vers la recherche non du visible mais des forces physiques invisibles qui le forment. Classé un temps et à tort parmi “réalistes” et “hyperréalistes”, dès ses premières œuvres il s’oriente vers une méditation sur la vision et le visible.
Serres et vitrines furent des thèmes récurrents où le verre était majeur en tant que matériau de la transparence et du reflet.
L’artiste renonce à toute représentation du monde pour traquer le pouvoir de certains phénomènes, en particulier les ombres par lesquelles il tente de figurer le temps selon des dispositifs originaux.
Un dessin préparé, à l’aide de pigment, peut être transféré sur une autre surface d’un seul coup de marteau.
Si bien que l’apparition du dessin rejoint l’immédiateté de la vision. Le son d’un diapason devient visible quand Bernard Moninot en capture les ondes qui se propagent dans une solution liquide et le pétrifie dans un verre.
Et le vent se visualise lorsque des branches deviennent des stylets qui tracent leurs mouvements sur des plaques de verre enduites d’un noir de fumée.
Moninot se place à la source des images pour enregistrer celles que les phénomènes inventent d’eux-mêmes et ses oeuvres sont des dessins dans l’espace en un processus de métamorphose.
Souvent réalisés en verre ou en fil de métal, ils deviennent les outils de cet atelier imaginaire où, en chacun, se fabrique la vision que l’artiste explique en un tel livre.
jean-paul gavard-perret
Bernard Moninot, Prendre le temps de vitesse, édition établie et préfacée par Renaud Ego, l’Atelier Contemporain, Strabourg, 2 juillet 2021, 304 p. — 25,00 €.