Une belle chronique sur l’adolescence
Benoît Philippon construit une intrigue joliment ficelée qui permet d’aborder nombre de thématiques qui, si elles sont très actuelles, remontent pour certaines à la nuit des temps. Il en est ainsi de l’éveil des sentiments, des premiers émois de l’amour, de l’alcoolisme et de ses méfaits. Le scénariste introduit l’écologie, le féminisme, les enfants et les femmes battues, le décalage entre le monde technologique et la nature, la crainte de l’étranger, de celui qui se démarque.
C’est le récit d’une bande d’ados qui évoluent, pendant les congés scolaires, dans les paysages de la vallée du Tarn. C’est le jeu des relations qui se nouent entre eux, entre leur groupe et les encadrants, avec les parents et plus généralement avec les adultes qui les environnent. Parallèlement, le scénariste décrit l’évolution de la société avec la vie d’un village qui cherche à subsister quand tout se défait, que les services publics désertent les uns après les autres suivant en cela le départ d’habitants.
Au cœur des gorges du Tarn, deux familles arrivent en vacances dans des maisons en vis-à-vis. Les parents de Swann sont des habitués, ceux de Léna viennent pour la première fois. Les deux adolescents échangent et sympathisent. Le chien de Swann, Wolverine, aide au rapprochement. Swann l’emmène retrouver la bande qui se réunit dans un bateau le Drakkrosaurus, un compromis entre ceux qui voulait une appellation préhistorique et ceux qui préféraient un rappel viking.
À l’intérieur, ils sont cinq à discuter et se chamailler : Jessie, Baba, Léon, Fanny et Tim. Ce dernier, frère de Fanny est sourd et muet. Ils sont tous venus en vacances sauf Léon, le fils du boucher, qui réside dans le village. Quelques jours plus tard, inscrits par les parents, ils se retrouvent pour un stage de kayak animé par Ted et Cécile. C’est le partage des événements, du quotidien, où chacun se découvre, avec les incidents liés aux rencontres, à la confrontation des caractères différents. Mais l’arrivée de Léna et le coup de trop pour Léon vont bouleverser l’ordre des choses, les équilibres acquis au fil des retrouvailles annuelles…
Le graphisme, dessin et couleurs, est l’œuvre de Nicolas Sauge. Ce Bisontin titulaire d’une maîtrise de littérature anglaise offre un dessin au confluent de nombreuses influences. Il oscille entre un dessin réaliste pour le cadre et les décors, pour la stature des personnages et emprunte aux mangakas l’art de l’expression ciselant des regards et des mimiques plus que parlantes.
Cet album débute une nouvelle série qui sera un rendez-vous estival avec la parution d’un tome avant chaque été. Elle est prévue en six albums pour décrire l’évolution de Swann et de ses amis le temps de six étés.
Un premier volume qui, tout en plantant le décor, entre dans le vif du sujet avec une histoire attrayante mise en images de belle manière.
serge perraud
Benoît Philippon (scénario), Nicolas Sauge (dessin et couleur), À l’année prochaine ! — t.01 : Tous pour un !, Éditions Auzou BD, mai 2021, 64 p. – 11,95 €.