Antoine Jacquemoud (1806–1887) est né et mort à Moutiers. Fils d’un négociant de Tarentaise, il part effectuer des études de médecine à Turin, avant d’y revenir et s’y installer. Il s’essaie d’abord à la poésie en participant aux concours de l’Académie de Savoie de 1838 et de 1840 dont il gagne les premiers prix. Ces prix de poésie tendaient à glorifier le Duché, ses traditions, ses réalisations, ses princes.
Le sujet de 1838 était « Le Comte Vert de Savoie » et l’auteur y crée une autobiographie poétique d’Amédée VI, qui régna en Savoie de 1343 à 1383.
Elle reprend, en vers alexandrins et en douze chants, les grands épisodes de sa vie et l’auteur s’y fait le laudateur de celui qui représente pour lui un modèle de courage, de sagesse, de piété, et d’autorité. Certes, il peut paraître étrange qu’Antoine Jacquemoud — connu pour son action politique, libérale, progressiste et tournée vers la France — défende et honore à travers lui l’ancienne Maison de Savoie-Piémont.
Néanmoins, après l’annexion de la Savoie à la France, en 1860, il sera plusieurs fois Conseiller général, avant de se retirer de la vie publique et de consacrer ses dernières années à la littérature médicale.
Par sa faconde lyrique et dans la versification et son imagination, il témoigne d’une époque riche et poétique, originale et émouvante que Rémi Mogenet souligne dans sa belle préface. Jacquemoud revient à un merveilleux chrétien qui alimente son chant. Il rejette la mythologie d’un merveilleux purement artificiel.
Il la remplace par l’admiration porté à son sujet, le tout à travers une spiritualité héritière des doctrines des écrivains savoyards que furent François de Sales et de Joseph de Maistre.
Comme eux et aussi au Comte Vert auquel il s’adresse, il
“Garde pieusement, comme un saint héritage,
Ce peuple, dont le soin va t’échoir en partage :
Comme il me fut légué, je le lègue à mon tour ;
Je l’aimais ; qu’il retrouve en toi tout mon amour.”
jean-paul gavard-perret
Antoine Jacquemoud, Le Comte Vert de Savoie — Poème héroïque, éditions Le Tour livres, Samoëns, 2021.