Dans l’envers de la lutte contre une pandémie
Ce roman, d’une actualité plus que brûlante, a été écrit avant le début de la présente pandémie due aux différentes covid 19.
Il s’appuie sur celle qui a été baptisée La Fièvre de Canton de 2002, qui a touché la Chine et les pays voisins, et sur l’épidémie Ebola qui a sévit dans l’Afrique de l’Ouest entre 2014 et 2015.
Sur un marché dans le district de Huiyang, à l’est de Canton, un homme s’effondre, la bouche en sang, après une quinte de toux. Une femme meurt quelques minutes plus tard, dans les mêmes conditions. La plus grande pandémie de ce début du millénaire vient de faire ses premières victimes.
À Macenta, en Guinée, Samuel Laveran, chercheur de l’Institut Pasteur, commence une nouvelle journée de lutte contre l’épidémie de fièvre hémorragique due au virus Ebola. Il a sympathisé avec Romain, un membre de la Croix-Rouge française. Il pense à Maud Bordet, rencontrée quelques mois auparavant (voir Le semeur de mort). Elle lui manque.
Celle-ci est à Genève, au siège de l’OMS, pour travailler le mémoire de son Master d’épidémiologie. Dans les chiffres relatifs à la Fièvre de Canton elle détecte de fortes anomalies. Elle obtient de pouvoir aller enquêter sur les lieux, en Extrême-Orient.
En 2002, Françoise, qui a initié au sein de l’Institut Pasteur un groupe d’intervention d’urgence est en route pour Hong Kong.
Romain, constatant la mine soucieuse de son ami, lui propose de l’accompagner dans le nord de la Guinée où il doit installer un nouveau laboratoire.
Quelques jours plus tard, le commandant Gérard Nicolle de la DGSI est informé que Samuel, Romain et leur chauffeur ont disparu. Il est inquiet et part pour la Guinée. Et Maud, prévenue, veut absolument intervenir…
Patrick Guillain, lorsqu’il n’écrit pas des polars, est microbiologiste, spécialiste des maladies infectieuses. On a déjà pu apprécier la qualité de sa plume avec Le semeur de mort (Métailié – 2018). Il donne dans ses intrigues nombre de détails précis, érudits sur de nombreux domaines mais particulièrement sur tout ce qui touche aux épidémies, bien que depuis un an et demi, le public ait été informé, plus ou moins bien, sur ces domaines.
Il décrit les organismes qui œuvrent sur ces zones épidémiques, les liens qu’ils tissent, ou qu’ils ne tissent pas, le fonctionnement de chacun, les précautions prises pour limiter la contagion, précautions maintenant bien connues des Français. Il aborde la concurrence féroce qui règne dans la recherche. Mais il visite d’autres domaines et apporte des descriptions très intéressantes sur le codage des messages, sur le relevé des empreintes…
Avec Maud, un personnage atypique, au look peu commun pour un médecin, avec Samuel dont le volontariat pour la Guinée n’est pas innocent, avec Gérard Nicolle ce policier qui traque le terrorisme, le romancier propose une intrigue aux nombreuses ramifications, au suspense tendu. Il fait des liens avec un passé lourd où tous les moyens sont bons pour satisfaire des sentiments peu humanistes, pour faire de l’argent puisque celui-ci, selon l’adage populaire, n’a pas d’odeur. Il tisse des fils adroits entre des événements de différentes périodes et donne des éléments très astucieux pour amener les enquêteurs à un dénouement peu banal.
Il note ainsi que, comme à son habitude, pour la Fièvre de Canton, la Chine nie tout incident et refuse la présence d’observateurs extérieurs. L’auteur avait, dans son précédent roman, porté un jugement peu flatteur sur les sommités médicales. Il réitère ici, son propos comparant des pontes à des dinosaures, des esprits étriqués ayant atteint le summum de l’étroitesse d’esprit.
Ce n’est pas rassurant car ces gugusses siègent à n’en pas douter dans les instances de l’OMS.
Avec Diagnostic à haut risque, Patrick Guillain, offre un magnifique roman sur un sujet difficile avec une capacité à concevoir de formidables intrigues.
serge perraud
Patrick Guillain, Diagnostic à haut risque, Éditions de l’aube, coll. “L’aube Noire — Polar”, mai 2021, 376 p. – 19,90 €.