Alexander Mikaberidze, Les guerres napoléoniennes. Une histoire globale

Napo­léon et le monde

C’est au tour de Napo­léon et du 1er Empire d’être englobé dans la mon­dia­li­sa­tion chère aux his­to­riens anglo-saxons. Je l’avais déjà noté au sujet de la bio­gra­phie de Louis XIV de Phi­lipp Man­sel. L’historien amé­ri­cain Alexan­der Mika­be­ridze le fait à son tour.
L’épopée impé­riale est ainsi sor­tie de son cadre euro­péen pour être repla­cée à une échelle mon­diale, ce qui per­met de voir qu’en effet tous les conti­nents ont subi les contre­coups du cata­clysme napo­léo­nien : L’Amérique du Nord bien sûr, et sur­tout l’Amérique latine mais aussi l’ensemble de l’aire asia­tique, depuis l’Empire otto­man jusqu’à la Chine.

Cette grille de lec­ture per­met à Mika­be­ridze de remettre en cause cer­tains acquis de l’historiographie fran­çaise. Contentons-nous de l’exemple le plus révé­la­teur. Selon lui, les guerres de l’Empire ne sont, à une plus grande échelle, que la conti­nuité du pro­jet hégé­mo­nique fran­çais tra­di­tion­nel et aussi de la riva­lité colo­niale franco-britannique, d’où un très – trop ? – long cha­pitre sur l’époque du XVIIIème siècle.
A cet égard, il rela­ti­vise les effets de la défaite de Tra­fal­gar et s’inscrit en faux avec la ten­dance à consi­dé­rer que la puis­sance mari­time de la France était irré­mé­dia­ble­ment abat­tue. Preuves à l’appui, il met en évi­dence les efforts de l’Empereur pour retrou­ver une arme navale d’envergure. Mais sur ce point comme sur d’autres, deux erreurs ont vrai­ment pesé : la guerre d’Espagne qui a aliéné à la France le sou­tien de la flotte espa­gnole ; et l’invasion de la Rus­sie qui a brisé net les inves­tis­se­ments faits dans les chan­tiers navals.

De sur­croît, Mika­be­ridze ne goûte guère l’image fran­çaise d’une dif­fu­sion des idéaux révo­lu­tion­naires à tra­vers l’Europe occu­pée par de bien­veillantes armées impé­riales. Bien au contraire, la France s’est conduite comme n’importe quelle puis­sance occu­pante avec son lot d’exactions, de répres­sions, de pillages, etc. Le blo­cus conti­nen­tal a, en matière éco­no­mique, joué un rôle très néga­tif sur l’ensemble du conti­nent.
Cet ouvrage reste donc très sti­mu­lant tant par la den­sité de son contenu que par l’originalité de ses analyses.

fre­de­ric le moal 

Alexan­der Mika­be­ridze, Les guerres napo­léo­niennes. Une his­toire glo­bale, Flam­ma­rion, novembre 2020, 1190 p. — 39,00 €.

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