Le cinéma… une arme de guerre ?
En 1941, dans Paris occupé, un incendie dans un cinéma détruit la pellicule d’un film de propagande nazie. Parallèlement, une jeune comédienne est assassinée. Le commissaire Engelberg Lange, assisté de l’inspecteur Clovis Gougon, mène une enquête sous haute tension tant de la part de sa hiérarchie que de la Gestapo. Une destruction de ce genre s’est déjà produite, ce qui agace fortement l’occupant.
Engelberg est traqué par un producteur qui veut lui faire tenir un rôle car il a, selon lui, l’envergure d’un Bonaparte. Il lui envoie même Edwige Feuillère pour le convaincre. Mais ce qui trouble le plus le commissaire est la présence constante de sa mère sous la forme d’une entité avec qui il a des conversations, plutôt des disputes. Celle-ci, comédienne, l’a abandonné lorsqu’il était enfant pour partir aux États-Unis faire carrière.
Et les piste ses multiplient. Avec Clovis, ils suivent un suspect à l’attitude singulière qui les mène sur un terrain inattendu. Et l’occupant se fait de plus en plus pressant, voire menaçant…
C’est à un voyage dans le milieu interlope du cinéma sous l’occupation que Laurent Galandon convie ses lecteurs avec ce diptyque. Il joue avec brio des fausses pistes, mettant en scène nombre de suspects, de coupables potentiels, que la poursuite des investigations met en cause. Il raconte les liens entre le système mis en place par les occupants et les composants de l’univers du cinéma, que ceux-ci soient producteurs, acteurs ou personnels techniques.
L’auteur base une partie de son intrigue sur des faits historiques comme l’opération montée par les nazis pour récupérer et détruire nombre de films soi-disant anti-allemands. Étaient particulièrement ciblés les films réalisés après janvier 1939 ou avant le mois d’octobre 1937. De plus, cela permettait la récupération des nitrates pour la fabrication de pellicules vierges.
Le dessin est confié à l’habileté d’Alicia Grande, une dessinatrice espagnole qui, avec beaucoup de réalisme, des traits particulièrement travaillés, le souci du détail, de proposer des vues en accord avec l’époque, donne de bien belle planches.
La colorisation d’Elvire de Cock s’accorde fort bien à l’ensemble qui, avec une sélection de couleurs assez neutres, restitue l’ambiance lourde et difficile de l’époque.
Avec Retour de flammes, un titre qui s’apparente à un jeu de mots, Laurent Galandon propose un beau récit, un éclairage sur une réalité peu médiatisée, une mise en images avec un fameux talent tant par Alicia Grande qu’Elvire de Cock.
serge perraud
Laurent Galandon (scénario), Alicia Grande (dessin) & Elvire de Cock (couleur), Retour de flammes – t.02 : Dernière séance, Glénat, coll. “24x32”, février 2021, 64 p. – 14,95 €.