Et s’il y avait eu de précédentes civilisations…
Science-fiction, anticipation, fantastique, Philippe Gauckler jongle avec les concepts des genres pour structurer un récit appuyé sur La Sphère d’or et La nuit des temps. Le premier est un roman de l’Australien Erle Cox, paru en France en 1929, dans la collection du Masque sous le numéro 29. Le second est l’œuvre de René Barjavel publié en 1968.
Ces deux romans traitent d’une civilisation qui, menacée par un danger cosmique, décide de créer une sorte d’arche de Noé pour préserver un couple pour pourra faire renaître la race humaine quand les conditions extérieures seront redevenues favorables.
Roy Koks, une ancienne gloire du hockey, reconverti dans la prospection minière, a découvert une énorme sphère à trois cents mètres sous terre dans le grand nord du Québec. Cet événement capital génère les réactions les plus diverses, événement dont les médias et les réseaux sociaux se sont emparés. C’est lorsqu’il saisit le disque métallique que tenait la passagère de la sphère, que Roy a ressenti un froid glacial. Brûlé au troisième degré, son organisme se régénère en deux jours.
Roy continue de se remémorer les faits et de témoigner. Le disque en main, il a senti qu’on inspirait toutes ses données, ses connaissances et qu’on lui transférait tout ce que l’Inconnue savait. Peu à peu, avec les scientifiques qui l’entourent, il va apprendre qui elle est, d’où elle vient. Roy est envouté par cette femme, qui dit s’appeler Adamante, avec qui il communique par télépathie. Ce qu’elle va lui révéler est stupéfiant et terriblement menaçant…
Avec la découverte de cette très ancienne civilisation, Philippe Gauckler met en perspective notre époque, les grandes composantes de notre civilisation occidentale, les modes d’emploi de nos sociétés. Il développe des problématiques très actuelles, des tensions entre peuplades, la crainte d’un conflit, d’une contagion, la perte de secrets, il déroule ces fausses nouvelles inspirées de la réalité, le déni des évidences…
Si Cox imaginait de belles avancées technologiques visionnaires dans son livre, Gauckler met l’accent sur les rapports humains, sur les relations entre Adamante et Roy, entrainés dans une relation sentimentale impossible, sans issue.
Le dessin en couleurs directes est magnifique. Le créateur maîtrise le graphisme de ses personnages, donnant à chacun une belle individualité facile à reconnaître au long des planches. Les décors sont d’un réalisme confondant, donnant froid avec ses paysages enneigés. Les symboles, en matière de décors, sont nombreux et l’inspiration est éclectique. Ainsi cette gondole qui file vers une sorte de porte rappelle le célèbre tableau L’Île des morts, ces rochers émergeant ceux de la Baie d’Along…
Un second tome qui clôt un superbe diptyque ou, sous couvert de science-fiction, l’auteur décortique les travers de notre civilisation et propose une belle intrigue en tension.
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serge perraud
Philippe Gauckler (scénario, dessin et couleurs), Kebek – t.02 : Adamante, Éditions Daniel Maghen, avril 2021, 88 p. – 19,00 €.