L’album s’ouvre une double page révélant un paysage de montagne absolument fabuleux. Puis l’Exorde d’Angelo de Syracuse pose les bases, celles du récit dont il a été chargé par Charles le Grand. Il doit raconter l’épopée des Francs au-delà des Pyrénées.
En ces temps incertains, dans le déclin de l’Empire romain, Charles croit être choisi par la main de Dieu pour être le phare de la chrétienté. Avec l’armée franque, le jeune et bouillant Roland mène les combats et soumet les Aquitains, les Lombards et, de nouveau, les Saxons. Partout les vaincus doivent se convertir… de gré ou de force.
Alors que Charles s’installe à Paderborn, bien à l’est de Dortmund, une ambassade de Sarrazins venant d’Al-Andalus se présente avec à leur tête le seigneur Sulayman ben Yaqzan. Celui-ci gouverne des cités au nord d’Al-Andalus. Il est à la tête d’une rébellion contre l’émir de Cordoue. Il propose son aide pour conserver ses possessions et en échange offre les clés de sa plus belle ville : Saragosse.
Charles est hésitant mais, des perspectives de conversion, de conquête des nouveaux territoires et surtout la passion de Roland le pousse à accepter. Il réunit une armée…
Après une présentation détaillée et solide du contexte de l’époque, des conquêtes de l’empereur et de son état d’esprit, le scénariste entre dans le vif du sujet, à savoir, l’épopée de Charles le Grand et de Roland en Hispanie. Il relate avec précision les différents événements et étapes qui ont conduit à monter cette expédition.
Avec érudition, Juan Luis Landa met en scène les acteurs de la conquête, les principaux personnages qui entouraient Charles, les peuples rencontrés, soumis, lors de la marche vers les Pyrénées. Il montre le poids des croyances, la volonté affichée de faire triompher le christianisme. Mais, en même temps, cela permettait de conquérir les territoires des peuplades à convertir. Où se situait la limite entre la ferveur en une foi à dispenser et l’envie de dominer encore plus de terres, de peuples, d’étendre son royaume ?
Si le scénario est passionnant pour sa minutieuse reconstitution, pour son analyse, le graphisme est littéralement époustouflant. Dans le domaine du dessin réaliste, Juan Luis Landa se révèle un maître. Il donne une mise en page cinématographique, une mise en images exceptionnelle. Outre les personnages dont il livre de véritables portraits, il offre des paysages, des scènes de bataille, des chevauchées remarquables et détaillés.
Les personnages sont campés de belle manière et la reconstitution des éléments de l’époque révèle un travail documentaire colossal. La mise en couleurs avec ses pages bicolores, en bistre, en noir et blanc, ces teintes froides sont d’une beauté rare.
Un premier album fascinant par le contenu du scénario, la reconstitution de l’époque et de l’épopée et un graphisme peu commun dans la qualité.
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serge perraud
Juan Luis Landa (scénario, dessin & couleurs), traduit de l’espagnol par Aurore Schmid, Chroniques de Roncevaux – t.01 : La Légende de Roland, Glénat, Coll. “24x32”, avril 2021, 64 p. – 14,95 €.