Marc Roche, Elle ne voulait pas être reine !

The Queen !

Ainsi Eli­za­beth II vient-elle de conduire son bien-aimé époux dans sa der­nière demeure, enve­lop­pée de ce halo de sobriété et de gran­deur dans lequel la monar­chie bri­tan­nique drape ses membres pour mieux les pro­té­ger. Per­son­nage majeure de l’histoire de cette ins­ti­tu­tion insub­mer­sible, la sou­ve­raine marche avec sa dignité habi­tuelle vers la fin de son règne qu’on entre­voit désor­mais avec des sen­ti­ments mêlés de crainte et de curio­sité.
Tant de choses ont été dites et écrites sur elle ! Pour­tant, le por­trait qu’en dresse Marc Roche mérite qu’on s’y arrête.

L’auteur connaît très bien la société, le monde poli­tique et la monar­chie bri­tan­niques. Il avait d’ailleurs écrit un livre pré­mo­ni­toire et per­ti­nent sur la réus­site du Brexit qui, lui aussi, doit être relu aujourd’hui !
Son exper­tise sur la reine Eli­za­beth s’appuie sur son expé­rience et sort des sen­tiers battus.

En effet, au lieu de nous décrire une gen­tille et tou­jours sou­riante vieille dame, grand-mère bien­veillante de la nation, et matriarche affec­tueuse de la famille royale, Marc Roche lève le voile sur une femme à la main de fer dans un gant de velours. Aucune hési­ta­tion ne l’arrête quand il s’agit « d’épurer » sa propre famille des titres d’Altesse royale et des pri­vi­lèges inhé­rents à ce titre qui obséda toute sa vie le duc de Wind­sor.
Aucune fai­blesse quand il devint évident que le ban­nis­se­ment de Diana s’imposait afin de pro­té­ger et la famille royale et l’institution aux­quelles s’attaquait la prin­cesse de Galles. Aucun sen­ti­ment d’affection par­ti­cu­lière pour ses brus qui, à l’exception de la com­tesse de Wes­sex, n’ont guère été à la hau­teur de ses espérances…

Fort inté­res­sants sont les deux cha­pitres consa­crés à Meghan Markle, fausse Diana mais vraie Wal­lis, qui, avec le prince Harry, fait les mêmes erreurs com­mises en leur temps par Edward VIII et Diana. On com­prend, en lisant Marc Roche, que la crise en réa­lité est grave et quelques mots échan­gés à la sor­tie d’un enter­re­ment entre deux frères aimants n’y feront rien.
La firm en effet va fonc­tion­ner pour s’autoprotéger de ces attaques ignobles.

Bref, Eli­za­beth II sait être dure, ran­cu­nière et vin­di­ca­tive quand il le faut. Quand la Cou­ronne, dont elle a hérité à contre­cœur, est mena­cée. C’est plus que son job. C’est son devoir.
Sa grand-mère, la reine Mary, qui compta tant dans sa for­ma­tion, n’avait-elle pas affirmé à son fils pro­digue Edward VIII : « Toute ma vie j’ai placé mon pays avant toute autre chose et je ne peux tout sim­ple­ment pas chan­ger main­te­nant [1]. »

fre­de­ric le Moal

Marc Roche, Elle ne vou­lait pas être reine !, Albin Michel, juillet 2020, 345 p. — 19,90 €.


[1] Cité in Anne Edwards. Matriarch. Queen Mary and the House of Wind­sor, Row­man & Lit­tel­field, 2015, p. 470.

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