Jean-David Morvan & Scietronc, Le Moine Mort – t.01 : “Le manuscrit condamné”

Quand le monde sombre dans le religieux…

Avec Sto­lin, ce jeune gar­çon inté­gré de force dans un monas­tère aus­tère où les moines confir­més ont la bouche cou­sue pour ne pas blas­phé­mer, Jean-David Mor­van fait décou­vrir une his­toire dans l’histoire. Sur fond d’intégrisme — ne fait-il pas inter­ve­nir une inqui­si­trice qui ne rêve que de bûchers ? — un per­son­nage prend connais­sance d’un récit pro­fane qui doit le mener vers une prise de conscience qui ne demande qu’à s’épanouir. Deux visions du monde s’opposent.
D’un côté les tenants d’une reli­gion qui est la seule valable et auto­ri­sée, de l’autre les tenants d’un schisme qui appelle à tous les excès, toutes les liber­tés, toutes les licences bien que ceux-ci pra­tiquent le meurtre, le vol, le viol… On est plus proche d’une bande de pillards que de reli­gieux confits dans l’adoration d’un dieu “d’amour”.

Les Pala­dins du Devoir, menés par Son Altesse le Principe-Combattente Ytrium, le preux parmi les preux, attaquent le camp retran­ché où est réfu­gié, parmi ses fidèles, le tris­te­ment légen­daire Darst Vos­tri. C’est la lutte du Bien contre le Mal absolu, le grand ordon­na­teur d’un schisme reli­gieux prô­nant toutes les licences, où les sept péchés capi­taux ser­vaient de table de la Loi.
Alors que ses troupes mas­sacrent à tout va, Ytrium les arrête car l’Inquisitrice Sophora veut des pri­son­niers.
Ce récit est l’œuvre d’Ernao Pira­nesi, un moine du monas­tère del Picco Dell’acqua qui le consigne dans un livre et raconte la suite, une suite où il est très impli­qué.
Ce moine décède et c’est Sto­lin, un ado­les­cent placé dans ce monas­tère, qui découvre le manus­crit dis­si­mulé sous un tapis dans la cel­lule d‘Ernao. Sto­lin, qui s’ennuie à mou­rir, décide de le cacher à son tour pour le lire secrè­te­ment. C’est ainsi qu’il prend connais­sance d’une his­toire terrible…

Dans ce conflit, un jeune inno­cent se retrouve incor­poré dans le mau­vais camp. Mais qui est-il aux yeux de ceux qui veulent abso­lu­ment éra­di­quer une croyance déviante ? On retrouve, dans ce récit, nombre de don­nées qui ont enflammé de longues périodes sous la hou­lette de malades men­taux et hélas, qu’on peut com­pa­rer à ce qui se passe encore sur la pla­nète.
Le scé­na­riste intègre un voca­bu­laire dont cer­tains mots se rap­prochent pho­né­ti­que­ment de ceux que l’on connaît et d’autres issus d’un patois, d’une langue morte ou étrangère.

Le des­sin et la mise en cou­leurs sont dus à Scie­tronc. Celui-ci est membre de l’atelier rémois The Tribe, crée par JD Mor­van. Avec un trait réa­liste, il pro­pose une mise en images avec de larges zones d’ombres pour mieux faire res­sor­tir l’essentiel et signe des décors très réus­sis. Les per­son­nages sont faci­le­ment iden­ti­fiables, expri­mant de belle manière leurs émo­tions. Sa mise en cou­leurs, par larges à-plats, ren­force l’atmosphère oppres­sante et inten­si­fie les sen­ti­ments des acteurs du drame.
Avec son art de récit, Jean-David Mor­van pro­pose un pre­mier tome qui, tout en plan­tant le décor, défi­nis­sant le cadre, entre dans le vif du sujet avec un début bien intri­gant et une belle mise en images.

lire un extrait

serge per­raud

Jean-David Mor­van (scé­na­rio), Scie­tronc (des­sin et cou­leurs), Le Moine Mort – t.01 : Le manus­crit condamné, Glé­nat, coll. “24x32”, mars 2021, 48 p. – 13,90 €.

Leave a Comment

Filed under Bande dessinée

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Vous pouvez utiliser ces balises et attributs HTML : <a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <strike> <strong>