Le mythe d’Orphée dans un Japon médiéval
Dans un Japon médiéval quelque peu imaginaire où se mêle rituels de la civilisation et puissance maléfique de démons, le scénariste déploie les destinées tragiques de deux protagonistes, une jeune femme qui veut faire revivre son fiancé, un jeune homme pacifique, séduit par sa beauté et sensible à sa quête. Pour elle, il va au bout de lui-même se révélant un autre individu. Elle ira au bout de sa démarche, quel qu’en soit le prix à payer.
Les deux héros évoluent dans les rituels de la civilisation japonaise, rituels parfaitement restitués que ce soit la cérémonie des repas, les règles de hiérarchie, de préséance et la vie quotidienne. Parallèlement, la mythologie, l’omniprésence de l’invisible, la tradition guerrière sont exprimées au plus juste. Les combats, nombreux et sanglants, rythment ce récit haut en tension où les sabres font le ménage.
Sadakïo a fait le serment de faire revivre son fiancé mort sur un champ de bataille grâce au pouvoir du Masque aux mille larmes. Cet objet magique est la propriété du prince Takedo. La route est longue et dangereuse.
Sadakïo reçoit l’aide de Masamura qui l’accompagne, la protège jusqu’au terme de sa quête, le château où elle se fait embaucher comme servante.
L’action de Pour prix de mes tourments, débute dans une salle de jeux. Un parieur, parce qu’il perd, est furieux et menace de faire couler le sang. Celui qui lance les dés lui indique que cette maison est tenue par Masamura. L’homme tombe à genoux et se confond en excuses avant d’être… foutu dehors. Comment ce jeune homme est-il devenu, en quelques temps, celui dont le seul nom engendre la peur ?
Le récit se déporte dans un proche passé. Mizuchi Mön, qui contrôle les bas quartiers, est sollicitée par deux clans rivaux qui veulent conquérir la ville et s’emparer du palais. Ils ont besoin de ses hommes et celle-ci fait monter les enchères en essayant de deviner ceux qui ont le plus de chances de l’emporter sans pour autant lui nuire.
Sadakïo qui cherche l’endroit où on cache le Masque fait la rencontre du prince, un prince séduit par sa beauté…
Le soin de la mise en images a été confié à Roberto Ali, un dessinateur né à Milan et qui est publié en France depuis quelques années. Son trait énergique est tout à fait approprié à cette histoire où la violence est très présente. Les personnages, campés avec élégance, évoluent dans des décors fort bien construits. Les scènes d’action sont dynamiques, très dynamiques. Il donne vie à une belle troupe de démons, tous plus fascinants les uns que les autres, réussissant à en rendre certains attachants.
Ce second volet clôt de belle manière ce diptyque où le japon sert de toile de fond à une histoire passionnante mise en images avec réussite.
lire un extrait
serge perraud
David Chauvel (scénario), Roberto Ali (dessin) & Walter (couleur), Le Masque aux mille larmes – t.02 : Pour prix de mes tourments, Dargaud, mars 2021, 72 p. – 15,00 €.