Affronter les ténèbres les plus sombres
Avec Loup y es-tu ? M. J. Arlidge propose une nouvelle enquête de sa policière préférée, Helen Grace, qui officie comme commandant dans la brigade criminelle de Southampton. Comme à son habitude, il ne ménage pas ses personnages, ceux-ci vivant des existences chargées en troubles divers, en pathologies psychiques.
Il en est ainsi de l’héroïne qui, sans perdre ses talents d’enquêtrice, est très perturbée psychiquement. Elle subit encore des séquelles consécutives au meurtre de ses parents, à la succession des foyers où elle a vécu, jusqu’à ce centre d’accueil de Basingstone proche du dernier cercle de l’enfer.
Mélanie Walton se réveille sous la tente plantée au camping ouvert récemment en lisière de forêt, dans le parc national de New Forest, proche de Southampton. Tom, son fiancé n’est plus là. Et il ne revient pas car il fuit dans la forêt sachant qu’il a la mort aux trousses.
Helen accueille le capitaine Joseph Hudson, recruté pour remplacer la capitaine Sanderson, assassinée sauvagement. Alors qu’elle lui présente les lieux, ils doivent partir. Une agente du parc à découvert un cadavre. Sur place, Helen voit le corps nu d’un homme pendu par les pieds à un chêne au milieu d’une clairière. Le corps est percé par trois carreaux d’arbalète. Parallèlement, des poneys sont retrouvés massacrés.
Helen et son équipe fouillent le passé de Tom. Il travaillait dans une entreprise dont l’installation a été très contestée car elle a détruit de la forêt pour édifier des bâtiments. C’est également le cas du camping.
Les investigations partent vers ces contestataires. Si les pistes ne manquent pas, les liens sont ténus, diffus. Et un second corps, celui de Lauren Scott, est découvert, tuée dans les mêmes conditions…
Le lecteur familier des romans de l’auteur retrouve le petit groupe de protagonistes qui gravite autour d’Helen. Mais le romancier n’hésite pas à enlever des personnages, à en rajouter. Ainsi, il fait disparaître dans un roman précédent, de façon brutale, la capitaine Sanderson et la remplace, dans le présent volet de la saga, par Joseph Hudson, un policier expérimenté, bel homme de surcroît. Il donne une large place à Emilia Garanita, la journaliste du Samthampton Evening News qui a l’art de mener des enquêtes parallèles, brouillant les pistes officielles.
Ce microcosme est confronté à une série de crimes inexplicables avec des victimes qui ne semblent avoir aucun lien entre elles, sauf à se trouver dans un environnement qui fait l’objet de mouvements de contestation comme ceux consécutifs à la déforestation d’une partie du territoire. Et les policiers s’engouffrent dans ces voies, les explorent pour aboutir à des impasses, retrouvent de nouveaux éléments qui les relancent sur des fausses pistes. Helen et son équipe peinent à cerner les motivations du tueur, à défaut de le démasquer.
Le romancier excelle dans l’art de faire rebondir une intrigue, d’explorer des domaines très intéressants même s’ils semblent ne pas avoir de liens avec le ou les meurtriers.
Mêlant nombre de problématiques tant sociales que sociétales ou psychique, le romancier évoque les survivalistes, les problèmes des enfants qui cauchemardent la nuit, donnant des raisons à ces situations. Il fait réaliser un interrogatoire surprenant à Helen.
M. J. Arlidge fait preuve d’une belle imagination et met en scène des actions étonnantes jusqu’à une conclusion remarquable, bouclant de belle manière un récit qui ne cesse de croître en tension.
serge perraud
M. J. Arlidge, Loup, y es-tu ? (Down to the Woods), traduit de l’anglais par Séverine Quelet, Les Escales, coll. “Noires”, février 2021, 512 p. – 22,90 €.