“Correspondances” entre gouffres et variations
Tout le travail de Laurence Skivée s’inscrit autour des correspondances entre divers protagonistes. Parfois des disparus (Warhol par exemple) mais surtout des bien vivantes — ici Anne Lefebvre et Natalia de Mello.
Elle le peut sans peine car elle possède un univers bien à elle et propre aux artistes belges qui savent mêler humour et profondeur à leurs œuvres.
Confinement aidant, le groupe “badine” en correspondances, ici avec, d’une part, Natalia de Mello dont le travail englobe le dessin et la gravure, la photographie et la vidéo, la sculpture et les installations.
Cette hybridation et interdisciplinarité sont guidées par la double préoccupation du rapport à l’espace et de la relation à l’autre, comme à la machine.
La photographe Anne Lefebvre finalise ce trio par ses prises qui touchent au subconscient et à l’intime. Et c’est pour elle la seule façon de “dire” qu’elle poursuit son travail dans son laboratoire de développement photographique„ sans autre théorie que la sienne en cherchant des failles et les accidents qui dénaturent ses photos avec une absolue poésie née des entrailles d’une beauté trop glacée.
De cette rencontre par missives se cultivent des paradoxes dans l’improbabilité d’un centre. Troubles et gondolements, transes, défaillances créent des trajets faits de crêtes et de creux, des corpus de “reliques “qui rendent la vie plus vive sans jamais s’appesantir.
Du moins tant que faire se peut, entre gouffres et variations, enfermement et ouvertures. Là où tout semble fuir en demeurant fixé.
jean-paul gavard-perret
Anne Lefebvre, Natalia de Mello & Laurence Skivée, Zones d’inconfort au Comptoir du livre, Liège, du 27 mars au 1er mai 2021.