K d’espéces — Fantômes que fantômes
Voilà une revue ambitieuse et qui fait la nique aux prétentieuses consoeurs de chez Gallimard ou Léo Scherr. Ici rien que des “voies” nouvelles sur papier ivoire.
La revue devient l’histoire de défense de ce qui se pense mal. Et ce, par des pierres qui roulent au souffle du vent . Qu’importe si la grande soupe du monde baille” comme l’écrit un des auteurs les plus intéressants de l’ensemble : Jérôme Bosmans. Thomas Godard, Stephen Graff, Kenny Ozier-Lafontaine, Margot Taupin et Elsa Ube sont aux commandes de ce bateau ivre en deux volumes : un de textes, un de dessins.
Est-ce un écho du temps ? La mort et ses fantômes rôdent superbement. La dérision et l’éros restent néanmoins présents. Jacques Cauda, Anne Van der Linden, Cornélia Eichhorn, Céline Guicard, Stephen Graff et Ozier Kenny-Lafontaine vocalisent graphiquement des délires pas forcément doux. Des ombres “vicieuses” planent dans la violence imperturbable des lignes et des courbes.
Et passant de la pulpe du réel à l’os feint les écrivains, de rimes en rimes ou en fragments, ne sont pas en reste. Ils demeurent aussi “inhumains” que leurs consœurs et confrères.
Il y a là dans les communions de voix, celles des morts mais aussi des vivants dont les flammes s’élancent plus haut que les poses fadasses qui répondent à l’inquisition des revues plus installées. Ilda S. Sturm par exemple enseigne autant l’errance et l’infinité de l’autre, indiquant que “pour vivre il faut mourir un peu”. Tandis que chez Stephen Graffou et chez Ozier, des spectres hantent des textes où s’opèrent arrachements et ouvertures jusque dans un froid que Thomas Godard souligne.
De ce Jambon tout est bon et l’ensemble klaxonne de manière stridente. Existe jusque dans les ombres un au-delà des brumes.
Pas de larmes en de telles mises en tropes : s’y consomment des prophéties délétères à bon escient.
Elles n’ont plus rien à voir avec celles de la Sainte Russie.
jean-paul gavard-perret
Jambon Klaxon, n°1, 2021.
Les déjantés lettrés , y compris JPGP , se sont bien amusés . Liberté gaie ! L’art est jambonné .