Jacqueline Fischer, Oeuvre poétique, 1966 –2020

Face au mur du temps

Jacque­line Fischer nous fait par­ta­ger la tota­lité de son par­cours poé­tique. Elle reste ins­pi­rée par la nature comme par ses sou­ve­nirs et les états de sa psy­ché. L’auteure se veut avant tout libre. Et sa poé­sie en est l’exemple même dans ses espaces ouverts.
Tout y est sus­pendu, aérien même si pour une telle créa­trice et plas­ti­cienne écrire n’a rien d’une expé­rience pure­ment métaphysique.

Etre poète c’est aussi être dans les choses comme dans son Pré­cis de bota­nique alter­na­tive par exemple. Et lorsqu’une forme d’abstraction appa­raît, ce n’est donc pas une épure spi­ri­tuelle mais conden­sa­tion per­cep­tive et affec­tive dans le parti pris de l’existence et son dérou­le­ment.
Quelques strophes suf­fisent à créer une concen­tra­tion du regard et une sub­ti­lité aussi grave qu’enjouée “pour pan­ser. Faire plaie, sire”.

Existent des fabu­lettes comme des pas­sages plus sérieux. L’objectif n’est pas de repré­sen­ter mais de four­nir un regard affûté et une réflexion du même tabac. Là où loin de tout manié­risme et dans une pers­pec­tive ancrée dans le réel, Jac­que­line Fischer fait tou­jours preuve de cou­rage, d’abnégation, d’attention, et d’humour.
Le geste poé­tique est aussi pré­cis que libre dans un équi­libre pré­caire. Il suf­fi­rait qu’une ligne soit autre pour que tout bas­cule. Jaillissent tou­jours des « espèces d’espaces » enva­his de lumière jusqu’à don­ner une sen­sa­tion autant d’humour que de ver­tige et de grâce.

Face au mur du temps (qui passe), tout vibre et déborde. La poé­tesse per­met de n’atteindre ni le propre ni le figuré mais des zones où nous per­dons par­fois la capa­cité de pen­ser pour rêver comme Jac­que­line Fischer le fait dans le par­tage du temps passé ou un éter­nel pré­sent.
Cela per­met de mettre en éveil nos propres oublis.

Il existe à la fois le génie du lieu et la han­tise du non-lieu. Ou si l’on pré­fère une sorte de pou­voir de la han­tise de l’air du Nord. Et la poé­tesse fait que ce dehors soit ce qu’on vit dedans.
Dans ce mou­ve­ment, chaque poème reste une écri­ture vivante où “trois petits riens” — quoiqu’en dise la poé­tesse — peuvent faire un tout là où son écri­ture se lève chaque jour et où l’esprit intime per­met aux mots d’aller outre les mues.

jean-paul gavard-perret

Jac­que­line Fischer, Oeuvre poé­tique, 1966 –2020, 2021, 518 p. — 20,00 €. Chez l’auteur, voir son Facebook.

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