De Nantes à Kyoto, un roman pour ados au carrefour des cultures françaises et japonaises
Elle aime chanter, boire des cafés forts, voir des films de François Truffaut et de Chris Marker. Elle appellera son fils Antoine, adoptera un chat qu’elle nommera Siôn et apprendra à faire des fondants au chocolat avec Jean, son père français qu’elle ne connaît pas. Depuis un an elle correspond avec Louisa, le bébé des consignes automatiques sauvé par Fumiko. Elles ont bien grandi depuis le départ de Jean et le suicide de Madame Violetta.
Un bébé est abandonné par sa mère dans une consigne automatique de la gare de Nantes. Son prénom Louisa est inscrit dans sa main. Il survit grâce à Fumiko, une jeune Japonaise enceinte, qui vient d’être quittée par son ami le marin Jean. Avant de retourner à Kyoto, elle laisse son adresse au Japon à l’attention de Louisa. Dix-sept ans plus tard les deux jeunes filles correspondent régulièrement et Eimi la lycéenne économise pour s’offrir le voyage jusqu’à Nantes et retrouver son père à l’aide de Louisa. Quelques jours avant son départ, Eimi meurt écrasée par les grilles de son lycée faute d’être arrivée avant 8 h 30. Louisa abandonne son travail de caissière pour partir à Kyoto sur les traces de celle qu’elle considérait comme sa sœur.
Voici un livre touchant que l’on aurait pu tout aussi bien trouver dans une collection pour adultes. Les deux jeunes filles sont plus mûres que leur âge et la structure du livre, construite sur la multiplicité des points de vue, est assez complexe. De plus il est riche en références culturelles ; sur la vie des jeunes Japonais (Eimi la lycéenne pose pour une Cookie Bikini, poupée de 30 cm à l’image de son modèle, destinée aux hommes) ou encore sur les usages en cours, surprenants pour une Française qui débarque. Des clins d’œil également au cinéma : on fredonne Baisers volés, chanson de Trenet issue du film éponyme de François Truffaut et l’un des personnage porte le nom d’un cinéaste japonais Takeshi Kitano. C’est un roman intimiste au parfum de polar, traversé de secrets et d’énigmes. Grâce à la ténacité de Louisa, fille de cartomancienne, élevée dans des familles d’accueil, certains voiles seront levés ; d’autres mystères resteront à jamais enfouis.
Lisa Bresner est née en 1971. Elle a été élevée dans le monde du spectacle depuis son enfance grâce à sa mère et à sa grand-mère et a appris le chinois et le japonais à l’âge de 12 ans. Sinologue et écrivain, elle publie son premier roman à 20 ans. Également danseuse, réalisatrice et comédienne, elle a écrit pas moins de 27 livres : romans, livres pour enfants, essais, exprimant la fascination de l’auteur pour les cultures asiatiques. Lisa Bresner nous a quittés en 2007 à l’âge de 35 ans. 8 h 29 est son livre posthume.
patricia chatel
Lisa Bresner , 8 h 29, Actes Sud Junior, mars 2008 — 150 p. — 8,50 €
A partir de 15 ans.