George Orwell, Mil neuf cent quatre-vingt-quatre

Une farce tragique !

Eric Arthur Blair (George Orwell) est né le 25 juin 1903. Dès 1922, il devient poli­cier colo­nial, acti­vité qu’il exerce jusqu’au 1er jan­vier 1928. Il passe alors dix-huit mois dans les bas-fonds de Londres, fré­quen­tant indi­gents, men­diants et pros­ti­tuées avant de se retrou­ver vrai­ment dans la dèche à Paris. Là, il vivote de cours d’anglais et de quelques articles. Son pre­mier récit impor­tant, L’Asile de nuit paraît en 1931.
En 1932, pour la publi­ca­tion d’un livre dont il est insa­tis­fait, il pro­pose à son agent quelques noms de plume dont George Orwell. C’est celui qu’il pré­fère, le nom d’une rivière du Suf­folk.
C’est en 1943, alors qu’il écrit La Ferme des Ani­maux, qu’il éta­blit un plan très détaillé d’un roman Le Der­nier Homme en Europe. Mais ce n’est qu’en début août 1946 qu’il achève les cin­quante pre­mières pages. Malade, avec de gros pro­blèmes pul­mo­naires, il ter­mine, cou­ché, une pre­mière ver­sion en 1947. C’est entre novembre et décembre 1948, tou­jours cou­ché dans un hôpi­tal, qu’il dac­ty­lo­gra­phie lui-même la der­nière ver­sion. Celle-ci est publiée en 1949 sous le titre Mil neuf cent quatre-vingt-quatre. Il décède le 21 jan­vier 1950.

C’est un roman par­ti­cu­liè­re­ment riche en thèmes. S’il décrit ce qui peut paraître une dic­ta­ture impro­bable, une tyran­nie où les excès sont pous­sés à l’extrême, Orwell s’appuie sur des tristes réa­li­tés qu’il a pu côtoyer. Il est proche des mou­vances socia­listes, se frotte aux idées du I.L.P. (Indé­pen­dant Labour Party). Son adhé­sion l’amène à par­ti­ci­per acti­ve­ment à la guerre d’Espagne contre les troupes de Franco. Mais, il quitte ce parti en 1939 à cause de l’opposition de ce groupe à la guerre contre l’Allemagne.
Il dénonce, avec verve et brio la main­mise d’un Etat sur ses citoyens et décrit les façons, les moyens mis en œuvre pour asseoir cette situa­tion dura­ble­ment. Il puise lar­ge­ment dans ce qu’il peut savoir des méthodes des régimes nazi et sta­li­nien. C’est le passé qui est réécrit pour cor­res­pondre au pré­sent, c’est un état de pénu­ries qui est expli­qué par une guerre per­pé­tuelle avec des nations conqué­rantes qui mettent en péril le pays.

Le citoyen doit deve­nir un robot, non pas ceux que l’on s’ingénie à construire aujourd’hui, qui doivent avoir une capa­cité d’analyse et de prise de déci­sion, mais des indi­vi­dus dénués de toute pen­sée, de toute envie, de tout rêve. D’ailleurs, il prône, par le biais de Big Bro­ther, le Grand Frère, cette idole imma­té­rielle incar­nant le Parti, le délit de pen­sée comme un for­fait majeur. L’action se déroule à Londres, un grand centre urbain d’Oceania, un des trois super-États du monde.
Avec son per­son­nage de Wins­ton Smith, il donne le récit de la résis­tance d’un homme ordi­naire face à une machine de mort qui semble indestructible.

C’est à la fois tru­cu­lent et angois­sant. L’auteur s’amuse avec la struc­ture admi­nis­tra­tive qu’il pré­sente comme une hydre, avec la nov­langue dont l’appauvrissement pro­grammé du voca­bu­laire amè­nera une impos­si­bi­lité de pen­ser, avec l’élaboration de son uni­vers et mena­çant. Mais, toutes les actions décrites dans le roman se retrouvent plus ou moins accen­tuées actuel­le­ment dans de nom­breux pays, sous une forme ou sous une autre, dans la pseudo-république de Chine, sous des théo­cra­ties dans des pays du Moyen-Orient.
Mil neuf cent quatre-vingt-quatre, cette farce tra­gique, est un des chefs-d’œuvre qui marquent par la satire des tota­li­ta­rismes de tous poils, par l’aspect pré­mo­ni­toire du texte.

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serge per­raud

George Orwell, Mil neuf cent quatre-vingt-quatre (Nine­teen Eighty-Four) tra­duc­tion de l’anglais par Phi­lippe Jaworski, Folio Clas­sique n°6891, Edi­tion de Phi­lippe Jaworski, jan­vier 2021, 512 p. – 8,60 €.

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