Didier Ayres, H.P. (Scènes de désespoir et de miracles) — 12

lelitteraire.com pro­pose de manière inédite à ses lec­teurs ayant appré­cié les billets “en marge” de Didier Ayres de décou­vrir chaque semaine une par­tie de son oeuvre théâ­trale, “H.P. (Scènes de déses­poir et de miracles)”.
Dernière scène cette semaine !

avant-propos de l’auteur :

H.P. porte un regard sur l’institution psy­chia­trique. En 12 scènes on y retrouve l’essentiel des vrais moments d’un asile, des séquences véri­diques de ce lieu de sur­veillance : les infir­miers, les patients, les thé­ra­peutes, les familles, l’heure du thé dans l’après-midi, la nuit avec ou sans som­meil, la conten­tion, les conver­sa­tions entre les asi­laires, etc. Ce qui res­sort de cette plon­gée en milieu hos­pi­ta­lier, c’est la souf­france de tous et de cha­cun, dou­leur qui s’exprime soit par l’angoisse, soit par le rire.

C’est ce des­tin d’une com­mu­nauté de vivants — com­pa­rables à des déte­nus — qui m’a poussé à ima­gi­ner cette pièce. La ten­sion dra­ma­tique, ten­sion d’êtres humains bous­cu­lés comme en une nef des fous, pour moi a fait théâtre (plus à mes yeux que la célé­bra­tion d’un office reli­gieux). Ce qui est sacré ici, c’est cette focale sur le fond de l’être. Ainsi, « le monde est un théâtre ».

didier ayres
lire la scène 11

 

Scène 12 :

Et lui ?

Oui, qu’en penses-tu ?

 

À cause de ta mère.

Tu crois ?

 

Je trouve. Il le consi­dère comme un enfant de 13 ans et l’hôpital lui four­nit un lit où il est materné ; il boit, il dort comme dans le ventre de sa mère.

Après la mort de son père.

 

Oui.

Une bles­sure.

 

Il est tombé deux fois en cata­to­nie, avec des crises d’angoisse et des troubles de l’humeur. Il ne s’échappe vers rien. La folie si tu veux.

 

Tu as confiance ?

Oui.

 

 

Il souffre ?

Je ne sais pas.

 

Une issue ?

Une issue ? Il n’y a pas d’issue, juste des miracles.

 

Les­quels ?

Un bout de soi, mais hors de soi. La foi, si tu préfères.

 

Année après année.

Une néces­sité spirituelle.

 

Un ami ?

Un ami.

 

Une amie ?

 

Quelqu’un.

Quelqu’un d’autre alors.

 

Un étran­ger.

Le corps.

 

Le corps ?

Oui, le corps des années 10, véhi­cule, com­mu­ni­ca­tion instantanée.

 

Réseau.

L’air du temps.

 

Il paraît normal.

Il est normal.

 

Un corps.

Alors ?

 

Années 20 puis 30. Qu’est-ce que tu dis ?

 

Le 23 juin 2017.

 

2 Comments

Filed under Théâtre

2 Responses to Didier Ayres, H.P. (Scènes de désespoir et de miracles) — 12

  1. Kamal Zerdoumi

    J’apprécie cette écri­ture qui n’a rien de clas­sique. Des îlots de parole soli­taire. Mise à mort de la com­mu­ni­ca­tion, du “bavar­dage” ras­su­rant, des “repères” qui n’en sont pas. C’est du théâtre nu, dépouillé. Gia­co­metti du verbe.

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