Exprimer l’insondable hors du raisonnable
La Boussole des rêves est constitué de trente-neuf textes où, sous le décor, se voit un paysage. Mais pas n’importe lequel. Le rêve y trouve des sources diverses : antiques, esthétiques, intimes.
Mais ce, au cœur d’une réalité qui résiste au désir, voire blesse l’enfant comme l’adulte là où “la transparence (est une) façon d’être imposée par les murs”.
Si bien qu’un tiraillement surgit, entre songe et réalité, révélant un lien émotionnel aux choses, aux êtres dans une poétique particulière où se croisent dans un hôtel particulier les vivants et les morts.
Les rêves se logent dans la musique des mots et en fils bariolés pour zébrer la nuit par des amours, visages, aventures, voyages que le chagrin menace mais ne détruit jamais.
Les corps trouvent en outre des échos en douze dessins ornant la rosace d’une boussole, seul viatique. Et un chœur s’en mêle : il est antique ou africain.
Mais c’est aux mots qu’est demandé d’exprimer l’insondable hors du raisonnable qui ne fait qu’épuiser la vision en prétendant la réclamer.
C’est par la poésie que la nuit ruisselle dans le jour et le jour dans la nuit, on ne sait comment mais ici cela avance pour peu qu’on se laisse prendre par les images et leurs surplombs sur le sens dans des jets d’intimité afin que la tête pense avec les yeux.
Pas de révélation sans cette charnière et cette réciprocité qui fouettent les désirs afin qu’ils se réveillent et s’osent.
L’auteur se veut avant tout un passeur. Il crée des béances et des bouillonnements plus que des chocs. Il ouvre des lèvres : celles de la plaie plus que du plaisir même si celui-ci fait retour par la sensorialité de la trace.
Dans une telle approche, le noir avale l’ombre mais aussi il la creuse.
A travers ce qui s’étend, c’est non l’âme liquide qui se déploie mais le corps. Il « parle » enfin son silence par les voies des rythmes entre présence et mirage.
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jean-paul gavard-perret
Jean-Jacques Marimbert, La Boussole des rêves, éditions Le Chat Polaire, Louvain la Neuve (Belgique), 2020, 90 p. — 12,00 €.