Rappelant parfois le travail du commando Bazooka et Kiki Picasso mais parfois ramenant à des plongées vers les gravures classiques, l’oeuvre de Justine Mullet suggère des angles de vie et de vue surprenants.
L’amour y fait son nœud sans que l’artiste éprouve le besoin d’égrener un rosaire érotique. D’où des mélopées visuelles qui ressemblent souvent à des blues insistants.
La cérémonie des corps fait cependant place par moments à des villes fantômes et les couleurs vives au noir et blanc. Si bien que le graphisme transforme le monde et la perception selon certains seuils d’écartement.
Les images échappent à l’entropie classique de représentation au moment où la jeune créatrice approfondit son univers hybride dans un imaginaire autant de construction que de déconstruction.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Ma séance de sport en vidéoconférence avec mon amie Johanna, tous les matins à 8h et le samedi à 9h.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Je les ai enterrés au fond du jardin quand je suis rentrée en études supérieures (master en direction artistique) mais, plus le temps passe, et plus des personnes me tendent la main, certains projets ont eu leur succès, je dirais donc que je me réconcilie avec ce rêve d’enfant de créer des univers (BD, illustrations, photographie,…) qui font oublier pendant quelques instants la vie extérieure.
A quoi avez-vous renoncé ?
Devenir professeur d’Histoire-Géographie
D’où venez-vous ?
J’aime dire que je suis née et j’ai grandi à 25 min en voiture de Germinal.
Un petit plaisir — quotidien ou non ?
En hiver j’aime bien manger une clémentine à 11h.
Qu’avez-vous reçu en “dot” ?
Une vérité générale, on ne peut pas gagner au Loto sans acheter de ticket, ou, la vie sourit aux audacieux, qui ne tente rien n’a rien… C’est terriblement basique comme dot mais c’est en osant que l’on peut espérer réaliser de belles choses.
Qu’est-ce qui vous distingue des autres artistes ?
Je dois faire partie de cette minorité d’artiste qui n’aime pas spécialement les oeuvres en noir et blanc…
Acceptez-vous qu’on parle de votre travail en termes de graphisme et de montage ?
Bien sûr.
Quelle est la première image qui vous interpella ?
Une photographie de la galerie des glaces du château de Versailles perdue dans un livre dont je ne me souviens plus du nom.
Et votre première lecture ?
Le livre illustré du “Roi Lion”.
Quelles musiques écoutez-vous ?
Un peu de tout (rock anglais, variété française, pop ‚…), j’ai récemment découvert la musique métal d’inspiration médiévale, très particulière mais pas désagréable.
Quel est le livre que vous aimez relire ?
“Bel-Ami” de Maupassant.
Quel film vous fait pleurer ?
“La ligne verte”.
Quand vous vous regardez dans un miroir qui voyez-vous ?
Bonne question… J’ai plusieurs moi, Justine lambda qui fait sa vie tranquillement, Justine professionnelle qui transpire la confiance en soi mais ce n’est jamais vraiment durable, Justine rêveuse qui malgré les obstacles veut réaliser ses rêves lentement mais sûrement elle n’est pas pressée, sûrement l’enfant perdu de mon âme, alors qui je vois dans le miroir dépend de qui regarde mon reflet.
A qui n’avez-vous jamais osé écrire ?
Mon professeur d’Histoire-Géographie en Terminale qui a écrit sur ma première copie “9/20 devoir indigne d’une élève de terminale”.
Quel(le) ville ou lieu a pour vous valeur de mythe ?
Les alignements de dolmens de Carnac
Quels sont les artistes et écrivains dont vous vous sentez le plus proche ?
Je me sens proche de l’artiste NatachaBirds, j’aime beaucoup qui elle est et son univers.
Qu’aimeriez-vous recevoir pour votre anniversaire ?
Un abonnement au courage infaillible valable 1 an.
Que défendez-vous ?
Je suis profondément féministe, la diffusion de la culture et la protection de la biodiversité me touche beaucoup.
Que vous inspire la phrase de Lacan : “L’Amour c’est donner quelque chose qu’on n’a pas à quelqu’un qui n’en veut pas”?
Mathématiquement, ça donnerait (-) + (-) = + . Mais dans la réalité ça n’est pas aussi simple.
Que pensez-vous de celle de W. Allen : “La réponse est oui mais quelle était la question ?“
Déformation professionnelle, j’attends le contre-ordre du contre-ordre de l’ordre avant de répondre à une question ou d’effectuer quelque chose.
Quelle question ai-je oublié de vous poser ?
Des rêves d’avenir ? Malheureusement ma vie, mon destin et mes yeux souffrent de myopie.
Entretien et présentation réalisés par jean-paul gavard-perret pour lelitteraire.com, le 30 novembre 2020.