Une chute quasiment impossible à deviner
Alors que la ville est en fête, Estíbaliz appelle Unai, son équipier, depuis la Vieille Cathédrale, ce dimanche 25 juillet. On a découvert, dans la crypte, les cadavres nus d’une fille et d’un garçon dans une pose étudiée. Unai revit alors des événements vieux de vingt ans quand des crimes similaires ont été commis. Cela avait commencé par le double crime du Dolmen avec deux nouveau-nés, puis sur le site celtibère, les salines romaines, les remparts médiévaux.
A chaque fois les cadavres d’une fille et d’un garçon toujours dans la même pose, dont les âges progressaient de cinq en cinq ans.
Tasio Ortiz de Zárate, une personnalité de la ville avait été arrêtée. Mais, il doit sortir de prison tout prochainement. Unai — policier réputé qui apprécie de faire équipe avec Estíbaliz, une inspectrice spécialisée en victimologie — comprend, en voyant les morts âgés d’une vingtaine d’années, que quelqu’un a repris l’effroyable progression. Qui prend le relais, alors que le criminel est encore enfermé ?
Parce que les similitudes sont trop fortes, Unai décide de voir Zárate en prison. Mais, avant même d’y aller, il reçoit un courriel du prisonnier. Celui-ci propose de l’aider dans son enquête.
Zárate, qui se déclare innocent, en sait beaucoup sur les meurtres du passé.
Trois personnages principaux portent le récit. Un quatrième, l’assassin, reste dans l’ombre, mais sa présence maléfique plane sur tout le livre.
L’inspecteur Unai López de Ayala, la quarantaine, est veuf depuis quelques temps. Il a vécu les meurtres précédents. Ceux-ci l’ont obsédé au point de lui faire choisir une carrière de policier, se spécialisant dans le profilage. Il se sent particulièrement impliqué dans l’affaire, voulant protéger la population de sa ville. Il travaille avec Estíbaliz Ruiz de Gauna, une jeune inspectrice qui va se marier. Elle a voulu s’intéresser aux victimes, les grandes oubliées dans ce genre d’affaires.
Alba Diaz de Salvatierra, une sous-commissaire, nouvellement arrivée dans la brigade, va prendre une place importante.
Autour de ce trio, l’auteure anime une galerie de personnages parfaitement campés, aux caractères finement étudiés et aux profils psychologiques structurés. Elle crée, entre eux, des relations complexes faites d’approches plus ou moins adroites, de rapports composés où l’amitié, les liens professionnels, le disputent à d’autres sentiments.
Avec ces éléments, la romancière tisse une intrigue sophistiquée, faisant des allers-retours entre présent et passé, livrant des pistes mais s’appliquant à distiller un mystère touffu, faire monter une tension jusqu’à une conclusion pratiquement impossible à deviner.
Eva García Sáenz de Urturi manie à merveille l’art du récit, du retournement de situation.
Le roman a pour décor Vitoria-Gastiz, la ville natale de la romancière. Cette cité, capitale de la province de l’Alava, et sa région sont riches d’un passé florissant, ayant été un point stratégique tant sur le plan militaire, commercial que culturel. C’est l’occasion, pour l’auteure de faire découvrir cette région et sa richesse à travers toutes les péripéties de l’intrigue.
Le livre, paru en Espagne en 2016 a suscité un tel engouement que l’Office de tourisme de la ville a organisé un circuit spécifique.
Ce livre se lit avec avidité. C’est le premier volet d’une trilogie avec Los ritos del agua et Los senores del Tiempo. Ces deux volumes sont parus en Espagne.
On ne peut que souhaiter une traduction assez rapide par les Éditions fleuve noir.
serge perraud
Eva García Sáenz de Urturi, Le silence de la ville blanche (El silencio de la ciudad blanca) traduit de l’espagnol (Espagne) par Judith Vernant, Fleuve noir, coll. “Roman policier & thriller”, septembre 2020, 564 p. – 21,90 €.