Là où la clarté est une conquête
Dans un face à face à quatre temps, Marie-Philippe Deloche et Danielle Berthet détricotent le temps pour faire jaillir l’oeuvre de la seconde depuis ses racines africaines jusqu’au bord du lac du Bourget.
Entre passé empiété et futur antérieur, cette “conversation de jardin” devient un lieu d’être, manifesté en lui même dans l’éclaircie de l’oeuvre constituée en majorité de dessins et de gravures.
Nous contemplons son secret à travers paysages, corps, matières. L’oeuvre est autant une image mentale — une “cosa mentale” — qu’un réceptacle aux émotions les plus profondes.
A travers ces textes se reposent les interrogations de Flaubert et de Spinoza : “Où commence l’âme où finit le corps ?”
Ce n’est en tous les cas qu’en tentant de cerner au plus près, non seulement les corps mais les paysages que l’on peut imaginer approcher les âmes. Loin de la seule apparence extérieure et hors exotisme, Danielle Berthet indique un certain désordre de la vie, dans une navigation entre abstraction et figuration.
Le bistre bascule parfois vers le gris comme le réel dans la poésie que l’artiste défend et illustre par ailleurs dans les rapports qu’elle crée avec les écrivains.
Toujours proche d’une douleur infuse, l’artiste poursuit un chemin souvent de solitude mais aussi de liberté dans l’épuisant paradoxe de faire et d’estomper.
Là où la clarté est une conquête.
jean-paul gavard-perret
Danielle Berthet & Marie-Philippe, Le temps susceptible des saisons, Folazil, coll. Tables de Chevet, Grenoble, 2020.